VII.86, § 3 à 6 : Taux variable

 

Article VII.86, § 1

§ 1er. Le taux d'intérêt débiteur est fixe ou variable. Si un ou plusieurs taux débiteur fixes ont été stipulés, celui-ci ou ceux-ci s'appliquent pendant la durée stipulée dans le contrat de crédit.

Article VII.86, § 2

§ 2. Sauf les exceptions prévues par le présent article quant à la variabilité du taux débiteur et aux coûts liés aux services de retrait d'espèces à un distributeur automatique de billets et, sans préjudice de l'application de l'article VII. 3, § 3, 6°, toute clause permettant de modifier les conditions du contrat de crédit est réputée non écrite.

Article VII.86, § 3

§ 3. Le contrat de crédit peut stipuler que le taux débiteur sera modifié dans les limites des articles VII. 78, § 2, 7°, et VII. 94. Sans préjudice de l'article VII.94, §§ 1 et 3, les contrats de crédit, à l'exception de l'ouverture de crédit, ne peuvent prévoir la variabilité du taux débiteur que dans les cas et selon les règles fixées par les articles VII.143 et VII.144.

L'ouverture de crédit peut stipuler que les coûts liés aux services de retrait d'espèces à un distributeur automatique de billets, lorsqu'ils ne sont pas repris dans le taux annuel effectif global, sont unilatéralement modifiés. En cas de modification de ces coûts, le consommateur a le droit de résilier sans frais l'ouverture de crédit dans un délai de deux mois à partir de la notification de cette modification. Les dispositions de l'article VII. 15, § 1er, sont d'application conforme. Cette modification peut intervenir une seul fois au cours de la durée de l'ouverture de crédit et les coûts initialement prévus peuvent être augmentés de 25 p.c. au maximum. Le Roi peut fixer une méthode de calcul ainsi qu'un maximum pour ces coûts.

Article VII.86, § 4

§ 4. Le cas échéant, le consommateur est informé d'une modification du taux débiteur, sur un support durable, avant que la modification n'entre en vigueur. Cette information indique également, le cas échéant, le montant des paiements à effectuer après l'entrée en vigueur du nouveau taux débiteur et précise si le nombre ou la périodicité des paiements varie.

Toutefois, les parties peuvent convenir dans le contrat de crédit que l'information visée à l'alinéa précédent est communiquée périodiquement au consommateur, lorsque la modification du taux débiteur résulte d'une modification d'un taux de référence, que le nouveau taux de référence est rendu public par des moyens appropriés et que l'information relative au nouveau taux de référence est également disponible dans les locaux du prêteur.

Article VII.86, § 5

§ 5. Lorsque, pour une ouverture de crédit sans constitution d'hypothèque, la modification du taux débiteur excède une marge de 25 p.c. du taux initialement ou précédemment convenu et, pour les contrats conclus pour une durée supérieure à un an, le consommateur a la faculté de résilier le contrat de crédit unilatéralement et sans coûts, dans les limites de l'article VII. 98. Toute clause contractuelle contraire à la présente disposition est nulle.

Article VII.86, § 6

§ 6. Lorsque tous les taux débiteurs ne sont pas définis dans le contrat, il faut considérer que le taux est fixe uniquement pour les périodes partielles pour lesquelles les taux débiteurs ont été déterminés exclusivement à l'aide d'un pourcentage fixe donné, convenu lors de la conclusion du contrat de crédit.

La modification du taux débiteur - genèse du texte.

La loi de 1991, dans sa version initiale, n'autorisait la variabilité du taux qu'en ce qui concerne les ouvertures de crédit (articles 58 et 60). Le texte de l'article 30 introduit à l'occasion de la réforme du 24 mars 2003 a autorisé la variabilité du taux pour tous les contrats de crédit mais sous la condition qu'il s'agisse de crédits consentis avec un délai de remboursement de plus de cinq ans et que la variation intervienne en fonction d'indices de référence externes au prêteur.

Il s'agissait de mettre fin à une controverse et d'ouvrir un nouveau marché pour des produits de durée plus longue mais dont l'offre était inexistante en raison de l'impossibilité de soumettre le taux aux fluctuations du marché dans la loi de 1991.

Cette liberté nouvelle a eu pour contrepoint une nouvelle mesure de protection du consommateur qui peut demander à allonger la durée du crédit (article 22, § 3, LCC) en cas de révision du taux pour conserver une charge identique.

La réforme introduite par la loi du 13 juin 2010 transposant la directive 2008/48/CE a étendu la possibilité de faire varier le taux débiteur à tous les contrats quelle que soit leur durée. L'exposé des motifs précise : Ces dispositions règlent la variabilité des conditions du crédit (montant du crédit, durée, taux d’intérêt, autres frais) et visent notamment à transposer l’article 11 de la directive. Les principes de droit existants contenus dans l’article 30, § 1er, LCC sont intégralement maintenus : seul le taux débiteur peut varier à l’exclusion de toutes les autres conditions de crédit. Aucune variabilité du taux d’intérêt de retard ne peut pas plus être stipulée. Celui-ci ne peut changer que dans la mesure où il est défini comme un pourcentage fixe du taux débiteur ou une majoration du taux débiteur (Doc.Parl., Chambre (52), 2009-2010, 2468/001, p.46 et 47).

Contrats pour lesquels la variabilité est autorisée

La loi autorise la variabilité pour tous les contrats de crédit à la consommation qu'il s'agisse de ventes ou de prêts à tempérament ou d'ouverture de crédit au sens large (facilités de caisse, ouverture de crédit avec amortissement réguliers en capital, ouverture de crédit avec cartes, etc). Les règles applicables sont cependant un peu différentes pour les ouvertures de crédit

Condition de la variabilité n°1 - une clause

La variabilité n'est possible que dans la mesure où une clause l'autorise explicitement.

Selon l'article VII.78, § 2, 7°, le contrat doit obligatoirement préciser : le taux débiteur, les conditions applicables à ce taux et, pour autant qu'il soit disponible, tout indice ou taux de référence qui se rapporte au taux débiteur initial, ainsi que les périodes, conditions et procédures d'adaptation du taux et, si différents taux débiteurs s'appliquent en fonction des circonstances, les informations susmentionnées portent sur tous les taux applicables.

La variabilité doit donc être contractuellement prévue et ce, quel que soit le type de crédit (même pour les ouvertures de crédit). Ainsi donc, si une ouverture de crédit ne stipule pas la variabilité du taux débiteur, le taux initial devra être appliqué pendant toute la durée du contrat.

Condition n°2 - les conditions applicables

Selon le texte des articles VII.78, § 2, 7°, la clause doit non seulement prévoir la variabilité du taux mais en outre en préciser les modalités.

En exigeant de préciser les conditions applicables, le Code oblige le prêteur à fournir une information précise sur les périodes (quand le taux peut-il changer ? à quelle fréquence ?), le mode de calcul (comment la variation est-elle calculée ?), la procédure (information du consommateur, droit de remboursement anticipé, etc.).

Si la variation est calculée en rapport avec un indice extérieur, la loi impose de mentionner l’indice ou le taux de référence qui se rapporte au taux initial. Enfin, si plusieurs taux sont applicables en fonction des circonstances, les conditions applicables doivent être précisées pour chacun de ces taux. Comme le veut l’article VII.78, § 2, 7°, ces informations doivent être fournies de façon claire et concise.

Condition n°3 – Variation soumise à des indices de référence

Sauf pour les ouvertures de crédit, la variabilité n’est admise que dans les cas et selon les règles fixées par les articles VII.143 et VII.144.

L’application de ces dispositions a pour conséquence que la clause de variabilité n’est notamment valable que pour autant que :

  • Il n’y ait qu’un seul taux débiteur par contrat de crédit. Cette disposition entend interdire plusieurs taux variables qui se succéderaient dans le temps, Il n'est pas interdit, par contre, de conclure simultanément plusieurs contrats de crédit dans des circonstances particulières qui justifient par exemple des conditions de remboursement différentes selon l'utilisation du crédit (Voyez l'exemple 36 dans l'annexe 1 à l'arrêté royal du 14 septembre 2016) qui prévoit un crédit remboursables par mensualités fixes pour financer une partie du prix d'acquisition, un crédit pont dans l'attente de la revente d'un autre bien et un crédit pour financer les travaux de rénovation. Chaque contrat de crédit doit être considéré comme une opération en soi et le taux périodique et le taux débiteur doit être précisé dans chaque cas.
  • Le taux débiteur doit fluctuer à la hausse comme à la baisse.
  • Le taux débiteur ne peut varier qu’au terme de périodes précises qui ne peuvent être inférieures à un an. Il n’est donc pas possible de prévoir une révision à un rythme plus accéléré qu’une adaptation annuelle.
  • La variation du taux doit être liée aux fluctuations d'un indice de référence pris parmi une série d'indices de référence en fonction de la durée des périodes de variation du taux d'intérêt. Le Code confie au Roi de déterminer La liste et le mode de calcul des indices de référence. Ceux-ci sont précisés à l'article 8 de l'arrêté royal du 14 septembre 2016 commenté par ailleurs sur ce site. Les indices sont liés au taux de rendement de la dette publique et dépendent de la durée de la période de variation. La variabilité triennale est ainsi liée au taux de rendement des obligations linéaires à trois ans.
    Cette disposition rend impossible la fixation de plusieurs taux variables successifs en fonction d'indices différents. Elle interdit également de prévoir qu'au terme d'une période de calcul, les parties se réservent de renégocier le taux dans l'hypothèse d'un crédit de longue durée pour lequel le taux ne serait précisé que pour la première période.
  • Il ne peut y avoir qu'un seul indice de référence pour le calcul d'un taux débiteur.Toutefois, il ne semble pas interdit de fournir plus d’un indice original dans le contrat de crédit en cas de révisions périodiques multiples des taux d’intérêt, même si cela dépend toujours de la périodicité des révisions des taux d’intérêt (par exemple, l’indice E pour une révision quinquennale).
  • Un indice différent peut être appliqué pour une durée restante du contrat différente, à condition que cela soit déterminé à l'avance dans le contrat. Si la durée du crédit est de huit années avec révision quinquennale, il serait ainsi possible de choisir l'indice E pour la première période de 5 années et l'indice C pour la période correspondant aux trois dernières années. Si le contrat ne prévoit qu'un indice, celui-ci s'appliquera pour la durée du contrat.
  • Le taux d'intérêt initial est le taux qui sert de base au calcul des intérêts dus par l'emprunteur lors du premier versement en intérêt. Il doit être mentionné dans le contrat.
  • La valeur initiale de l'indice de référence doit également être mentionnée dans le contrat (VII.143, § 5). La valeur initiale de l’indice de référence est celle figurant sur la liste des tarifs des taux d'intérêt pour le type de crédit considéré et concerne la valeur du mois civil précédant la date de ce tarif.
  • Le mode de calcul est déterminé par la loi : A l'expiration des périodes déterminées dans le contrat de crédit, le taux débiteur initial est augmenté de la différence entre la valeur de l'indice de référence publiée dans le mois civil précédant la date de la variation, et la valeur initiale de cet indice.
  • Le contrat de crédit doit stipuler que la variation du taux d'intérêt est limitée, tant à la hausse qu'à la baisse, à un écart déterminé par rapport au taux d'intérêt initial, sans que cet écart en cas de hausse du taux d'intérêt puisse être supérieur à l'écart en cas de baisse. Le Code impose de la sorte au prêteur de prévoir un taux "plancher" et un taux "plafond". A cet égard, l'arrêt Guterrez Naranjo de la Cour de Justice n'a pas remis en cause la technique des clauses plancher même si, par ailleurs, elle a considéré en l'espèce, que la clause était abusive parce qu'elle se trouvait noyée dans les conditions générales et que le consommateur n'avait pas reçu une information adéquate lors de la conclusion du contrat. Ceci souligne l'importance d'indiquer de manière particulièrement claire les modalités de variation dans le contrat et dans le SECCI et l'ESIS (En ce sens, BIQUET-MATHIEU, C. "Le capital et les intérêts", in Le crédit hypothécaire au consommateur, ULG/ECL, Larcier, Coll. Patrimoine et notariat, 2017, p. 285).
  • Le contrat de crédit peut également prévoir que le taux d'intérêt ne varie que si la modification à la hausse ou à la baisse produit, par rapport au taux d'intérêt de la période précédente, une différence minimale déterminée.
  • Si la première période a une durée inférieure à trois années, une variation à la hausse du taux d'intérêt ne peut pas avoir pour effet d'augmenter le taux d'intérêt applicable à la deuxième année de plus de l'équivalent d'un point pour cent l'an par rapport au taux d'intérêt initial, ni d'augmenter le taux d'intérêt applicable à la troisième année de plus de l'équivalent de deux points pour cent l'an par rapport à ce taux d'intérêt initial.
  • Des règles particulières sont prévues pour le cas où le taux débiteur initial était affecté d’une réduction conditionnelle (article VII.143, § 4). Ceci concerne plus particulièrement le crédit hypothécaire.

Le Code organise donc une variation « automatique ». Le nouveau taux d’intérêt est le résultat d’un calcul opéré à partir d’un indice de référence totalement indépendant du prêteur. La variation elle-même n’est pas soumise à l’appréciation du prêteur. Tout est prédéterminé dans le contrat.

Condition n°4 – Information préalable du consommateur

Principe

L'article VII.86, § 4, impose une information au consommateur. Cette information doit être préalable à la modification du taux et être reprise sur un support durable. L'information doit également être donnée au consommateur en cas de modification du taux n’émanant pas du prêteur (par exemple, si la modification est la conséquence d’une réduction du taux maximum autorisé).

Le ministre de l'Economie a sanctionné un prêteur qui, parmi d'autres infractions, avait négligé d'informer préalablement les consommateurs du changement de taux à la baisse. Dans le cadre d'un recours en suspension de la sanction devant les juridictions ordinaires,la Cour d'appel a rejeté l'argumentation du prêteur qui soutenait que l'avertissement préalable n'était nécessaire qu'en cas de hausse du taux débiteur .

Exception – information périodique

Les parties peuvent toutefois convenir que l’information relative à la variation du taux débiteur sera communiquée périodiquement. Cette faculté n’est autorisée que lorsque la variation est la conséquence d’une modification d’un taux de référence, que ce taux de référence est rendu public par des moyens appropriés et que l’information relative au nouveau taux de référence est disponible dans les locaux du prêteur.

Les termes de cette disposition sont la transposition de l’article 11.2 de la directive 2008/48/CE. Les termes rendus publics par des moyens appropriés font référence à la possibilité pour le consommateur de prendre connaissance du taux de référence à tout moment par la consultation de périodiques, du site internet de l’entreprise ou d’un tiers, etc. En pareil cas, la modification du taux pourra être portée à la connaissance du consommateur par un avis joint au relevé périodique prévu par l’article VII.99 § 1.

Contenu de l’information

L'information doit porter sur le nouveau taux débiteur et indiquer, le cas échéant, le montant des paiements à effectuer après l'entrée en vigueur du nouveau taux débiteur. Cette communication doit également préciser si le nombre ou la périodicité des paiements varie.

Sanction du défaut d'information

Le consommateur est relevé de plein droit des intérêts et frais se rapportant à la période sur laquelle porte l'infraction selon l'article VII.200. Il en résulte que le consommateur pourra prétendre au remboursement des intérêts et frais payés entre le jour où l'information aurait dû être communiquée et celui où le prêteur communiquera le taux appliqué conformément à l'article VII.86, § 4 (voy. J.P. Spa-Malmédy, 16 octobre 2003, Ann. Crédit 2003, 128 et note J. VAN LYSEBETTENS, De wet van 14 juli 1998, Ann. Crédit 2003, 133; J.P. Grimbergen, 19 novembre 2003, Ann. Crédit, 2003, 140).

Condition n°5 – La variation doit rester dans les limites des TAEG maxima

L’article VII.94 reste d’application même si le contrat de crédit autorise la variation du taux débiteur. La variation du taux débiteur ne peut donc avoir pour effet de porter le TAEG du contrat de crédit au-delà du maximum autorisé par le Roi en fonction du type, du montant et éventuellement, de la durée du crédit. Si cela devait être le cas, la variation du taux débiteur sera bridée par le TAEG maximum. Le nouveau TAEG doit être calculé sur base du solde restant dû et des montants de terme à payer.

Par ailleurs, toute baisse du TAEG maximum est d’application immédiate aux contrats en cours (pour autant qu’ils prévoient la variabilité du taux débiteur (article VII.94, § 3, alinéa 2). Dès lors, si le TAEG est à un taux qui dépasse le nouveau maximum autorisé, le prêteur sera tenu de réduire le taux débiteur à due concurrence. En pareil cas, le consommateur doit être informé de la réduction qui est une variation comme une autre même si elle ne résulte pas directement de l’évolution du taux de référence.

Conséquence :pas d'indemnité de remploi en cas de remboursement anticipé pendant la période où le taux est variable

Aucune indemnité de remploi ne peut être réclamée pour un contrat de crédit à la consommation lorsque le remboursement intervient dans une période où le taux débiteur n'est pas fixe (VII.97, § 2, 4°). Cette règle n'existe pas pour les contrats de crédit hypothécaire.

Sanction civile

La violation de l’article de l’article VII.86, § 2, a pour conséquence que le consommateur est relevé de plein droit des intérêts et frais se rapportant à la période sur laquelle porte l’infraction (VII.200). Outre cette sanction civile, il semble qu’il faut considérer en outre que la clause est nulle et donc que le contrat est conclu à taux fixe. On ne voit pas comment en effet, le prêteur pourrait modifier unilatéralement la clause illégale ou l’appliquer différemment pour la rendre conforme à la loi. La seule chose qu’il puisse faire est de renoncer à l’appliquer pour éviter la sanction civile de l’article VII.200. En sens inverse, le consommateur peut subir un préjudice du fait de l’absence de réduction du taux en cas de baisse de l’indice de référence. Il serait alors en droit de constater qu’il y a infraction et de réclamer l’application de la sanction civile.

Dans le cas où le prêteur ne réduit pas le taux conformément à l’article VII.94, §3, alinéa 2, il y a dépassement du TAEG maximum légal et les obligations du consommateur sont réduites de plein droit au montant emprunté conformément à l’article VII.196,1°.

La variabilité du taux des ouvertures de crédit - Exception à la variabilité sur la base des indices du fonds des rentes

Il y a une exception importante à l’obligation de respecter les indices ou taux de référence publiés en application des articles VII.143 et VII.144. Les ouvertures de crédit peuvent varier en fonction d’autres paramètres et selon une méthode de calcul qui peut s’écarter des règles prévues aux dispositions précitées.

L’exposé des motifs précise à cet égard : L’ouverture de crédit ordinaire bénéficie d’un régime plus libre mais, à la lumière de l’article 10 de la directive tel que transposé dans l’article 14, § 3, 7°, LCC, il ne peut être question d’une simple modification unilatérale. Le prêteur devra au moins mentionner dans le contrat de crédit, comment, de quelle manière et selon quelles conditions et procédures, le taux débiteur peut être modifié. La modification unilatérale actuelle devra être adaptée en ce sens (Doc. Parl., Chambre, (52) 2009-2010, 2468/001, p. 47).

L’article VII.78, § 2, 7° impose de préciser le taux débiteur, les conditions applicables à ce taux et, pour autant qu'il soit disponible, tout indice ou taux de référence qui se rapporte au taux débiteur initial, ainsi que les périodes, conditions et procédures d'adaptation du taux et, si différents taux débiteurs s'appliquent en fonction des circonstances, les informations susmentionnées portent sur tous les taux applicables ;

Dès lors que le mode de fixation doit être entièrement déterminé lors de la conclusion du contrat, il n’est pas possible de prévoir une méthode qui laisserait, fût-ce partiellement, l’adaptation du taux à la seule appréciation du prêteur. Cette position fait toutefois l’objet de controverses (cfr. J. VANNEROM, Consumentenbescherming bij de uitvoering en herziening van kredietovereenkomsten, Intersentia, 2015, p. 276, n°292).

Le SPF Economie estime qu’il incombe au prêteur de préciser dans le contrat de crédit, les conditions de la variation comme, par exemple, l’indice qui servira de référence. Il ne peut s’agir d’indices de références purement internes (tel le taux de base de la banque) et en aucun cas, le changement ne peut être arbitraire. Le SPF Economie se réfère à cet égard aux arrêts de la CJU du 26 février 2015 dans l'affaire Matei C 143/13 et à celui du 30 avril 2014 dans l'affaire Arpad Kasler C-26/13 sur l'interprétation de la directive 93/13 (clauses abusives).

Il faut rappeler que l’article VI.37 précise que Lorsque toutes ou certaines clauses d'un contrat entre une entreprise et un consommateur sont écrites, ces clauses doivent être rédigées de manière claire et compréhensible.

Dans l’affaire Kasler, la Cour a jugé que «L’exigence de transparence des clauses contractuelles posée par la directive 93/13 ne saurait donc être réduite au seul caractère compréhensible sur les plans formel et grammatical de celles-ci» mais doit, au contraire, être interprétée de manière extensive ce qui implique la compréhension des conséquences économiques, potentiellement significatives, pour le consommateur des clauses du contrat (points 71,72 et 74 dans l’affaire Arpad Kasler).

Dans l’affaire Matei la Cour a souligné (point 74) «que revêt une importance essentielle aux fins du respect de l’exigence de transparence le point de savoir si le contrat de prêt expose de manière transparente les motifs et les particularités du mécanisme de modification du taux d’intérêt et la relation entre cette clause et d’autres clauses relatives à la rémunération du prêteur, de sorte qu’un consommateur informé puisse prévoir, sur la base de critères précis et intelligibles, les conséquences économiques qui en découlent pour lui (voir, en ce sens, arrêt Kásler et Káslerné Rábai, EU:C:2014:282, point 73).

Il est donc impératif que le contrat d'ouverture de crédit à la consommation expose de manière détaillée les modalités de la variation du taux et s'agissant d'apprécier les conséquences économiques, la variation ne peut dépendre du prêteur (sur cette problématique, voy. ég. C.BIQUET MATHIEU et F. RENSON, "les charges du crédit", inCrédit aux consommateurs et aux PME, CUP, vol 170, décembre 2016, n°99, p. 332).

Si les dispositions relatives à la variabilité du taux ne satisfont pas aux exigences légales, le prêteur encourt la sanction de l’article VII.195 : le juge annule le contrat ou réduit les obligations du consommateur au maximum jusqu'au prix au comptant ou au montant emprunté.

Faculté de résiliation anticipée des ouvertures de crédit

L'article VII.86, § 5 prévoit une protection pour le consommateur au cas où il s'agit d'une ouverture de crédit à durée déterminée d'une durée supérieure à un an. Dans ce cas et lorsque la modification du taux d'intérêt excède une marge de 25 p.c. du taux initialement ou précédemment convenu, le consommateur pourra mettre fin au contrat avant le terme convenu selon les modalités précisées à l'article VII.98, c'est-à-dire sans frais et immédiatement à moins que le contrat ne prévoie un préavis qui ne peut dépasser un mois.

Ce droit à résilier sans frais ne peut être exercé que pendant une durée de trois mois prenant cours à compter de la notification du nouveau taux débiteur. Si ce délai est dépassé, le consommateur pourra malgré tout mettre fin sur base de l’article VII.98 s’il s’agit d’une ouverture de crédit à durée indéterminée ou sur base de l’article VII.97, s’il s’agit d’une ouverture de crédit à durée déterminée. Rappelons enfin qu’en matière d’ouverture de crédit, le consommateur peut toujours rembourser le crédit sans nécessairement mettre fin au contrat de crédit. Aucune indemnité d’aucune sorte ne peut lui être réclamée s’il ne prélève pas en tout ou en partie le crédit octroyé (article VII.85). Toutefois, les frais récurrents éventuels resteront à charge du consommateur jusqu’à la résiliation.

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Les contrats à plusieurs taux.

Le § 6 de l’article VII.86 reprend la clause impérative figurant dans la définition du taux débiteur fixe visé à l’article 3, k) in fine, de la directive. Comme le relevait le Conseil d’État, il peut en effet être déduit de cette disposition qu’un même contrat d’ouverture de crédit sans constitution d’hypothèque “peut utiliser une combinaison de taux fixes et variables”. En outre, le taux de base pour le taux débiteur variable peut être différent du taux débiteur fixe. Dans ce cas, cela doit être expressément mentionné tant dans l’information précontractuelle que contractuelle. Par contre, tel qu’indiqué au § 2 du présent article, l’article 9, § 1er, entre autres, de la loi du 4 août 1992 relative au crédit hypothécaire, s’appliquera aux autres contrats de crédit (Exposé des Motifs, Doc. Parl., Chambre, Session n° 52, 2468/001, p. 47-48).

Variabilité du taux et tableau d’amortissement

L’article VII.78, § 1, oblige les prêteurs à remettre un tableau d’amortissement pour les contrats qui prévoient un amortissement du capital sauf pour les ouvertures de crédit. Le contrat doit également préciser le droit du consommateur de recevoir à tout moment et sans frais un tableau d’amortissement (article VII.78, § 3, 4°) lequel doit préciser une mention claire et concise que les données mentionnées dans le tableau ne seront valables que jusqu'à la modification suivante du taux débiteur ou des coûts additionnels conformément au contrat de crédit (article VII.78, § 3, 4°, c).

Le droit du consommateur au maintien du montant des termes

Le législateur a voulu assurer une certaine protection au consommateur dont la trésorerie pourrait être mise à mal par des révisions successives du taux. L'article VII.95, § 3 oblige le prêteur qui stipule la variabilité du taux à insérer dans le contrat une clause reconnaissant au consommateur en cas d'adaptation du taux débiteur, le droit d'exiger le maintien du montant du terme et par voie de conséquence inévitable, la prolongation (ou la réduction) du délai de remboursement.

En ce cas et par exception à la règle de la prohibition des modifications au contrat de crédit, l'article VII.95, § 3 autorise donc les parties à revoir la durée de remboursement convenue initialement. Par ailleurs, la loi autorise en pareil cas que la durée qui permet au consommateur de maintenir les montants du terme soit supérieure à la durée maximale fixée par le Roi en exécution de l'article VII.95 §1. L'article VII.95, § 3 fait obligation au prêteur, préalablement à la conclusion du contrat de crédit, d'informer expressément le consommateur de ce droit.

Avis de l'administration.

  • Un prêteur peut-il consentir un prêt à un taux qui varie quotidiennement (exemple taux BIBOR + x%) alors que la loi prévoit que le consommateur doit être avisé préalablement avant chaque changement de taux ? Sous l’empire de la législation antérieure à la réforme du 13 juin 2010, l’administration avait répondu négativement au motif que la loi imposait un avertissement préalable. Cette position ne sera pas maintenue vu la possibilité de prévoir une information périodique pour autant que le taux de référence soit rendu public, condition que l’EURIBOR remplit.
  • Lorsque le prêteur se réserve le droit de modifier le taux d’intérêt débiteur, il doit stipuler comment et quand. Il ne suffit pas de stipuler que le prêteur « peut modifier le taux d’intérêt débiteur à n’importe quel moment ». L’indice éventuel ou taux de référence, ainsi que les délais, conditions et procédures de modification du taux d’intérêt débiteur doivent figurer dans le contrat (voir l'intégralité de la remarque dans les Remarques les plus courantes du SPF Economie lors de l’évaluation des contrats de crédit à la consommation).

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