VII.107 : Procédure judiciaire en facilités de paiement

Article VII.107

Texte de la disposition

Article VII.107

§ 1er. Le juge de paix peut octroyer les facilités de paiement qu'il détermine au consommateur dont la situation financière s'est aggravée.
Lorsque l'octroi de facilités de paiement augmente les coûts du contrat de crédit, le juge de paix fixe la part devant être prise en charge par le consommateur.
Le juge compétent peut accorder au consommateur un délai de paiement ou un échelonnement des dettes visées à l'article VII. 106, §§ 1er et 2, même lorsque le prêteur applique une clause telle que visée à l'article VII. 105 ou en exige l'application.

§ 2. Par dérogation aux articles 2032, 4°, et 2039 du Code civil, la caution, et le cas échéant la personne qui constitue une sûreté doivent respecter le plan de facilités de paiement, tel qu'octroyé par le juge de paix au consommateur.

§ 3. Lorsqu'elles sont contraintes de payer, la caution et, le cas échéant, la personne qui constitue une sûreté, peuvent solliciter du juge de paix l'octroi de facilités de paiement, suivant les mêmes conditions et modalités que celles déterminées par les articles 1337bis à 1337octies du Code judiciaire relatifs à l'octroi de facilités de paiement au consommateur en matière de crédit à la consommation.

Genèse de la disposition

Genèse de la procédure en délais de paiement (38, LCC et VII.107, CDE)

L'intention

La LCC encadrait le crédit à la consommation de manière essentiellement préventive. L'article 38 LCC [VII.107, CDE] est l'une des seules dispositions qui aborde la problématique du crédit à la consommation ou l'abus de crédit à la consommation sous l'angle curatif. Il s'agit de permettre au consommateur qui connaît une détérioration de sa situation financière de demander des facilités de paiement au juge. Les travaux préparatoires donnaient des exemples de circonstances justifiant un tel réaménagement. On visait ainsi la maladie, l'accident, le lock out, le chômage et la perte d'emploi, le divorce et la séparation, les grèves reconnues (Doc. Parl., Sénat, 1989-1990, 916-1, p.30).

L'intention était ainsi, par une procédure rapide et peu coûteuse devant le juge de paix, de tenter de trouver une solution d'urgence pour des cas de surendettement qui, en raison de leur caractère spécifique, réclament une solution sur mesure (Ibid.).

Comme l'octroi de facilités de paiement entraîne une majoration des frais et des coûts du prêteur, la loi permet au juge de paix de déterminer ce que le consommateur devra payer en contrepartie du réaménagement de sa dette. Pour le surplus, l'exposé des motifs énonce que dans la droite ligne du projet, il serait opportun qu'un regroupement des créanciers sous le contrôle du pouvoir judiciaire soit mis en place là où l'action isolée en termes et délais ne suffit pas pour répondre aux crises aiguës de surendettement (Doc. Parl., Sénat, 1989-1990, 916-1, p. 31).

Cette approche se concrétisera sept années plus tard par la loi sur le règlement collectif de dettes. Le texte initial de la loi énonce que sans préjudice des dispositions de l'article 1244 du Code civil, le juge de paix peut octroyer les facilités de paiement qu'il détermine au consommateur dont la situation financière s'est aggravée. L'article 114 LCC de la loi organisait la procédure par l'insertion des articles 1337bis à 1337octies dans le Code judiciaire.

L'échec de la mise en œuvre

Cette disposition s'est avérée problématique et décevante pour le consommateur pour plusieurs raisons. Les principaux problèmes portaient sur l'exigence de la bonne foi (problématique des déclarations inexactes du consommateur parfois suscitées par des intermédiaires peu scrupuleux) - requise par certaines juridictions et non exigée par la loi pour les autres, et l'absence de circonstances nouvelles justifiant le surendettement.

La procédure devant le juge de paix s'est avérée longue et coûteuse: tous les prêteurs devaient être mis à la cause et la demande fondée sur l'article 38 LCC, suscitait immédiatement une demande reconventionnelle en paiement de la totalité du crédit ce qui entraînait l'exigibilité des droits d'enregistrement.

La mise en état de la procédure pouvait prendre plusieurs mois de manière telle que le consommateur aux prises avec ses difficultés, devait anticiper sur la décision à intervenir et modifier unilatéralement les modalités de paiement à ses créanciers. Selon certaines décisions, la demande fondée sur l’article 38 LCC entraînait même de plein droit la dénonciation des contrats de crédit (J.P. Eghezée, 22 janvier 1996, Annuaire juridique du crédit 1996, p. 385). Selon d’autres, au contraire, la demande suspendait l’obligation de paiement des mensualités jusqu’à ce que la réduction ait été convenue amiablement ou judiciairement (J.P. Soignies, 8 mars 1996, Annuaire juridique du crédit 1996, p. 399). Le texte appelait donc une réforme qui interviendra avec la loi de 2003.

La réforme de 2003

Lors de la réforme de la loi en 2003, un amendement à l'article 38 a été proposé, tendant à insérer les mots « Par dérogation aux conditions prévues à l’article1244 du Code civil » au lieu de « Sans préjudice des dispositions de l’article 1244 du Code civil» (amendement n°15, Doc.Parl., Chambre (50), 1730/03, p.15). Cet amendement a été modifié au cours de la discussion en commission après que le ministre ait marqué son accord sur le principe de cette modification : En effet, dans les réglementations récentes, en matière de faillite ou de règlement collectif de dettes, la notion de débiteur «malheureux et de bonne foi» est abandonnée (Doc.Parl., Chambre (50), 1730/06, p. 22).

L'amendement a été simplifié par la suppression pure et simple au renvoi de l'article 1244 du Code civil. Il s'en déduit que l'accès à la procédure de termes et délais visée à l'article 38 ne requiert pas la bonne foi au sens de l'article 1244. Le débat a par ailleurs perdu de son utilité depuis l'entrée en vigueur de la Centrale des Crédits aux Particuliers dès lors qu'il n'est plus possible de cacher au prêteur l'existence de contrats de crédit en cours.

Par ailleurs, par le même amendement, le pouvoir a été reconnu au juge de paix d'appliquer l'article 38, même au cas où le contrat aurait été dénoncé par application d'une clause résolutoire. Enfin, les jugements prononcés en application de cette procédure ont été exemptés du droit d'enregistrement (article 82 de la loi du 24 mars 2003 insérant un point 47° à l'article 162 du Code des droits d'enregistrement, d'hypothèque et de greffe).

Le prêteur peut-il accorder des délais de paiement ?

Le contrat de crédit est intangible. Il n'est donc pas possible dans le cadre d'un crédit à la consommation d'accorder des termes et délais qui auront pour effet de modifier fondamentalement la convention. De tels termes et délais constituent en réalité un nouveau contrat de crédit dont la conclusion doit respecter le formalisme légal. Les termes et délais ne peuvent donc porter que sur des termes de paiement échus et impayés (ou partiellement payés). Dans les limites de l'article 29, le prêteur peut dénoncer le contrat de crédit. Il peut aussi ne pas exercer cette faculté (pour autant que le contrat ne prévoie pas la résolution de plein droit). Dans les deux cas, les indemnités maximales qui pourront être réclamées par le prêteur sont fixées par l'article 27 bis, LCC [VII.106, CDE].

Condition d'accès à la procédure

Uniquement les contrats de crédit à la consommation

La faculté de demander des facilités de paiement s'applique à tous les contrats de crédit à la consommation régis qu'ils le soient totalement ou qu'ils ne le soient que partiellement. Par application de l’article VII.147/24, alinéa 2, qui renvoie à l'article VII.107, la même procédure s’applique aux contrats de crédit hypothécaire à but mobilier qui ne s’accompagnent pas de la constitution d’une sûreté hypothécaire. Par contre et alors que les difficultés du consommateur peuvent provenir d'une dette étrangère aux crédits à la consommation (par exemple un arriéré d'impôts), seuls les crédits à la consommation (et les CHDM) sont visés par l'article VII.107 et peuvent faire l’objet d’un aménagement par le juge de paix.

Pour les autres dettes ou pour les dettes déjà échues et pour lesquelles un rééchelonnement s'avérerait impossible, le droit commun s'applique et notamment l'article 1244 du Code civil. Les conditions d'application de l'article 1244 C.c. supposent que le juge prenne en considération la situation des parties et les termes et délais déjà accordés. Il faut en outre que le débiteur soit malheureux et de bonne foi. Les délais accordés doivent être adaptés aux capacités paiement du consommateur mais ils doivent également permettre un amortissement effectif de la dette.

La condition d'aggravation de la situation

Le recours à l'article VII.107 suppose une aggravation de la situation financière du consommateur. La réforme de 2003 ayant mis fin aux hésitations de la jurisprudence antérieure, le juge de paix peut se limiter à constater l'aggravation objective de la situation du consommateur sans avoir à apprécier quelle est la part de responsabilité de celui-ci dans cette aggravation (J.P. Fontaine-l'Evêque, 2 septembre 2004, J.J.P., 2006, 78). Il ne s'agit donc pas d'apprécier le comportement du consommateur, de savoir s'il a ou non commis une faute (J.P. Roeselare,11 juin 2009, RW 2009-2010,1576). La procédure est donc légitime s'il y a aggravation de la situation même si celle-ci est la conséquence d'une séparation (J.P. Châtelet, 10 juillet 2008, Ann. Jur. 2008, 29), d'un accident ou d'un licenciement sans préavis pour faute.

L'article VII.107 organise une procédure originale, distincte de la procédure de droit commun visée à l'article 1244 du Code civil (voy. ci-avant genèse). L'aggravation suppose la constatation objective de la difficulté pour le consommateur de faire face à ses obligations, résultant d'une modification des circonstances ayant entraîné une réduction de ses revenus ou une augmentation de ses charges. Il peut s'agir de causes totalement imprévisibles (accident, maladie, fermeture d'entreprise) ou propres au consommateur (divorce, naissance, démission, licenciement pour faute etc).

Le refus du créancier comme préalable

L'article 1337bis du Code judiciaire précise que cette procédure ne peut être introduite qu'après le refus du créancier d'accorder au débiteur les facilités de paiement que ce dernier lui aura demandées, par lettre recommandée à la poste, mentionnant les motifs de la demande.

Après l'expiration d'un délai d'un mois, prenant cours à la date du dépôt de la lettre recommandée à la poste visée à l'alinéa précédent, le silence du créancier est réputé constituer une décision de refus. Il est généralement considéré que cette formalité n'est pas une condition de recevabilité de l'action (contra : J.P. Etterbeek, 27 décembre 2011, JJP 2013, 182 et note BIQUET-MATHIEU C., "Facilités de paiement, demande amiable et rééchelonnement"; STEENNOT R. et al., "Overzicht van rechtspraak consumenten bescherming (2005-2014)", T.P.R. 2015 - 3/4, n° 453, 1767) et que seul compte, le refus non équivoque du créancier (J.P. Seraing, 9 octobre 1992 R.G. 5323 : Il importe peu que le refus des créanciers soit intervenu à la suite d'une demande formulée par une lettre ordinaire ou par un pli recommandé, dès l'instant où ce refus est certain. L'absence de demande formulée par une lettre recommandée a uniquement pour effet de ne pas mettre en œuvre la présomption de refus prévue par l'article 1337 bis alinéa 3 du Code judiciaire). Par ailleurs, la demande de facilités de paiement que le consommateur doit adresser au prêteur avant de solliciter du juge ces facilités de paiement sur base de l'article VII.107 CDE ne doit pas nécessairement être chiffrée (J.P. Tournai II, 19 mars 2002, Ann. Crédit, 2002, 220).

La demande peut être introduite alors que le crédit est dénoncé et n'est pas incompatible avec une demande de termes et délais fondée sur l'article 124 C.c. (J.P. Châtelet, 10 juillet 2008, Ann. Jur. 2008, 89).

La procédure

Procédure particulière ou collective

La procédure peut être dirigée par le consommateur contre un prêteur déterminé ou contre l'ensemble des prêteurs lui ayant consenti un crédit à la consommation. Rien ne l'oblige à mettre tous les prêteurs à la cause. Il pourrait ne diriger sa demande que contre le prêteur dont le crédit constitue la principale charge de remboursement. La loi autorise également le prêteur qui n'aurait pas été partie en cause, à faire tierce opposition.

La procédure visée par l'article 38 est organisée par les articles 1337 bis à 1337 octies du Code judiciaire

Compétence

Les demandes fondées sur l'article VII.107 sont de la compétence du juge de paix du domicile du consommateur à l'instar de la compétence générale de ce dernier pour les demandes dirigées contre les consommateurs sur base de cette loi (article 591 -21° du Code judiciaire).

Introduction par requête

La demande peut être introduite par requête (après constatation du refus du créancier - voir ci-avant conditions d'accès) (mais elle pourrait également l'être par citation). L'article 1337 bis exclut l'introduction par requête si le juge de paix a déjà été saisi d'une demande concernant le contrat.

Dans la requête doit figurer la déclaration qu'il n'existe aucune demande au fond concernant le contrat pour lequel des facilités sont demandées. S'il existe une procédure pendante, la demande de facilités de paiement pourra être introduite par voie de conclusions comme extension de la demande principale (si le consommateur est demandeur) ou comme demande reconventionnelle (si le consommateur est défendeur). Le contenu de la requête est précisé à l'article 1337 ter. Une copie du ou des contrats de crédit doit être jointe. La requête doit être déposée en autant d'exemplaires que de parties à la cause.

La demande de facilités ne peut être introduite par voir reconventionnelle à l'occasion d'une procédure introduite par le prêteur (J.P. Malmédy, 1er octobre 1997, Ann. Crédit 1997, 240 et note F. DOMONT NAERT, Ann. Crédit 1997, 246; STEENNOT R. et al., "Overzicht van rechtspraak consumenten bescherming (2005-2014)", T.P.R. 2015 - 3/4, n°453, 1767). En cas d'action du prêteur, le seul recours du consommateur sera l'article 1244 du Code civil, dans les conditions qu'il exige (débiteur malheureux et de bonne foi) (J.P. Meise, 17 avril 2008, Ann. Jur. 2008, 35).

Absence de formalisme

Le législateur a voulu faciliter l'accès de la procédure aux consommateurs. La requête peut donc être signée par le requérant lui-même et si la requête est incomplète, il n'en résulte aucune nullité : le juge invite simplement le requérant à compléter sa demande (1337 quater).

Gratuité

Les décisions rendues sont exemptées du droit d'enregistrement par application de l'article 164 47° du Code des droits d'enregistrement. Par application de l'article 279-1, 1° de ce même Code, ces affaires bénéficient également de l'exemption du droit de mise au rôle. Une procédure fondée sur l'article 1337 bis est donc totalement exemptée de droits. Par contre, les indemnités de procédure pourront être accordées par le juge au consommateur ou au prêteur.

Effets du dépôt de la requête

La loi n'attribue aucune conséquence particulière au dépôt de la requête. Elle ne suspend pas les obligations des contrats de crédit (contra : J.P. Soignies, 8 mars 1996, Annuaire juridique du crédit 1996, p. 399) pas plus qu'elle n'entraîne la dénonciation de plein droit des contrats (contra : J.P. Eghezée, 22 janvier 1996, Annuaire juridique du crédit 1996, p. 385).

Cependant, eu égard à la durée de la procédure, le consommateur devra souvent mettre en œuvre immédiatement les facilités qu'il a sollicitées sans attendre la décision du juge. S'il s'agit d'un contrat de crédit déjà dénoncé, le juge pourra, sans pouvoir faire revivre le lien contractuel, accorder des facilités de paiement pour le solde calculé conformément à l'article VII.106 de la loi.

Si par contre il s'agit d'un contrat non dénoncé, le prêteur pourra user des clauses résolutoires pour mettre fin au contrat de crédit. Si le juge accorde les facilités que le consommateur sollicite, il pourra faire remonter les effets de sa décision à la date d'introduction de la requête. Les facilités accordées par le juge de paix pourront ainsi avoir pour effet de rendre la dénonciation inopérante. La décision qui accorde (ou qui refuse) les facilités sollicitées, devra être communiquée à la Centrale des Crédits aux Particuliers.

Fixation de la cause

Selon l'article 1337 quinquies, après inscription de la requête au rôle, les parties sont convoquées par le greffier, par pli judiciaire, à comparaître à l'audience fixée par le juge. Une copie de la requête et des pièces justificatives sont jointes à la convocation de toutes les parties autres que le requérant.

Jugement exécutoire

Les décisions rendues sur base de la procédure en facilités de paiement sont exécutoires nonobstant appel et sans caution. L'appel du créancier ne privera pas le consommateur des facilités consenties par le juge. En cas de refus des facilités consenties, le juge pourra prononcer un jugement de condamnation dans le cadre d'une demande reconventionnelle introduite par le prêteur si le consommateur a interrompu ou réduit ses paiements dans le cours de la procédure.

Selon le juge de paix de Roeselare, il n'y a pas lieu de condamner le consommateur au paiement de l'indemnité de procédure au motif que la procédure n'a pas pour objet de départager les droits respectifs du prêteur et de créancier et qu'en outre, l'indemnité de procédure irait à l'encontre du but recherché par le législateur en organisant cette procédure (J.P. Roeselare,11 juin 2009, RW 2009-2010,1576).

Jurisprudence

  • Le réaménagement de la dette tel que le demande le consommateur provoquerait un allongement excessif de la durée du contrat. Les facilités de paiement sont limitées à une suspension des mensualités échues et impayées de même que celles échues deux mois après le jugement (J.P. Roeselare, 10 février 1995, J.J.P. 1998, 543).
  • Mensualité réduite à ce qui est nécessaire pour rembourser le capital et qui reste supportable par les consommateurs avec report du paiement du coût du crédit postérieurement au terme du contrat (J.P. Bastogne - Neufchâteau, 22 mai 2009, Ann. Jur. 2009, 107 et note BOVY D. et HUMBLET S., "Article 38 LCC: manifestement obsolète et pourtant toujours utile").

Les pouvoirs du juge

Pas de remise de dettes en capital ou intérêts - rééchelonnement pour les échéances futures

Le juge n'a pas le pouvoir de libérer le consommateur de tout ou partie de ses obligations en ce qui concerne le paiement du capital ou des coûts du crédit. Si de telles mesures sont nécessaires pour permettre au consommateur de conserver des conditions de vie dignes, il faut alors envisager une procédure en règlement collectif où de telles mesures sont possibles. La procédure de l'article VII.107 a donc un objectif limité : il s'agit de rééchelonner le paiement de la dette mais non de dispenser du paiement de celle-ci, fût-ce en partie. Le juge peut néanmoins moduler l’augmentation des coûts du crédit liés au rééchelonnement.

Le rééchelonnement n'est possible que pour les échéances futures. Si le consommateur est en retard de paiement, le rééchelonnement ne pourra pas s'appliquer aux dettes déjà échues (J.P. Bastenaken - Neufchâteau, 22 mai 2009, Ann. Jur. 2009, 107 et note BOVY D. et HUMBLET S., "Article 38 LCC: manifestement obsolète et pourtant toujours utile"). Par contre, il résulte du texte même de la disposition que la résolution du contrat de crédit n'interdit pas l'octroi de facilités de paiement au sens de l'article VII.107 (BIQUET-MATHIEU C., "Facilités de paiement, demande amiable et rééchelonnement", note sous J.P. Etterbeek, 27 décembre 2011, JJP 2013, 682)

Appréciation de l'augmentation des coûts

Par ailleurs, lorsque l'octroi de facilités de paiement entraîne une augmentation des coûts du contrat de crédit, le juge détermine la partie qui est à la charge du requérant (articles VII.107, §1er, alinéa 2 CDE et 1337 sexies C. jud.).

La loi reconnaît au juge de paix un large pouvoir d'appréciation entre deux extrêmes : il peut imposer au consommateur de supporter toute l'augmentation du coût résultant des facilités accordées comme il peut décider de laisser cette augmentation à charge du prêteur. L'expression les coûts du contrat de crédit est ambiguë.

Crédits dénoncés avant le dépôt de la requête

S'il s'agit d'un contrat de crédit déjà dénoncé, le juge ne pourra faire revivre le lien contractuel. Les facilités de paiement porteront sur le solde dû par le consommateur et calculé conformément à l'article VII.106. L'article VII.107 précise à cet égard : le juge peut accorder au consommateur un délai de paiement ou un échelonnement des dettes visées à l'article VII.106, §§ 1er et 2, même lorsque le prêteur applique une clause, telle que visée à l'article VII.105 ou en exige l'application. L'augmentation du coût devra dans ce cas s'apprécier sur base des modalités de calcul prévues par l'article VII.106.

Crédits non encore dénoncés lors du dépôt de la requête

S'il accorde des facilités de paiement alors que le contrat de crédit n'a pas été résolu avant le dépôt de la requête, les facilités accordées se substituent aux dispositions contractuelles qu'elles modifient.

Aussi longtemps que les facilités consenties sont respectées, le prêteur ne peut faire usage des clauses résolutoires. Par contre,l’article 1337 sexies C. jud. précise que le requérant perd le bénéfice des facilités de paiement s'il ne respecte pas les échéances imposées et les modalités de paiement.

Si les facilités de paiement ne sont pas respectées, les dispositions contractuelles initiales retrouvent leur plein effet et devront être appliquées pour le calcul de la dette du consommateur. Si compte tenu des délais d'instruction de la cause, le consommateur met en œuvre les facilités qu'il a sollicitées sans attendre la décision judiciaire, il s'expose à la dénonciation du contrat de crédit.

Si ultérieurement, le juge accorde les facilités que le consommateur sollicite, il pourra faire remonter les effets de sa décision à la date d'introduction de la requête. Les facilités accordées par le juge de paix pourront ainsi avoir pour effet de rendre la dénonciation inopérante et obliger le prêteur à rectifier les données transmises à la Centrale des Crédits aux Particuliers. La décision qui accorde (ou qui refuse) les facilités sollicitées devront en tout état de cause, être communiquée à la Centrale des Crédits aux Particuliers.

Communication à la Centrale des crédits aux Particuliers

Le greffier envoie à la Banque nationale de Belgique une copie certifiée conforme de tout jugement par lequel les facilités de paiement ont été accordées ou refusées (article 1337octies). Dès lors que les décisions sont exécutoires, cette communication s'impose même en cas d'appel.

Les effets des facilités de paiement sur le cautionnement (art. VII.107, § 2)

En droit commun, la caution ou la personne qui s’est constituée sûreté personnelle peut agir contre le débiteur principal pour être remboursée des sommes payées au créancier (2032, 4°, Code civil). L’article 2039 du Code civil prévoit que les termes et délais accordés par le créancier au débiteur principal, ne peuvent être invoqués par la caution.

Si la caution doit s’exécuter et payer le créancier, elle peut alors se retourner à son tour contre le débiteur principal qui perd ainsi le bénéfice des termes et délais que lui avait accordé le créancier initial.

Afin d’éviter cette conséquence paradoxale, le législateur a prévu que, par dérogation aux articles 2032, 4° et 2039 du Code civil, la caution ou la personne qui constitue une sûreté personnelle doit respecter le plan de facilités de paiement accordé par le juge de paix au consommateur (art. VII.107, § 2) (voy. Doc. Parl., Sénat, 1989-1990, n°916/2, p. 130).

Cette disposition élargit en quelque sorte le mécanisme de la chose jugée en rendant opposable le jugement à la sûreté personnelle.

La demande de facilités de paiement de la sûreté personnelle (art. VII.107, § 3)

L’article VII.107, § 3 offre la possibilité à la sûreté personnelle de solliciter à son tour des facilités de paiement au juge de paix lorsqu’elle est poursuivie par le prêteur.

Cette procédure est soumise aux mêmes conditions et aux mêmes modalités que celles qui s’appliquent lorsque la demande émane du consommateur (art. 1337bis à 1337octies C. jud.).

La mise en demeure adressée à la sûreté personnelle constitue le point de départ d’une telle action. Cette disposition est d’importance puisqu’en droit commun, les délais de grâce octroyés par le juge au débiteur principal sont rangés dans la catégorie des exceptions purement personnelles au débiteur (art. 2036 C. civ.) et à ce titre, ne peuvent être invoquées par la caution ou le codébiteur (C. BIQUET-MATHIEU, « Les sûretés personnelles », in Handboek consumentenkrediet, éd. E. Terryn, Die Keure, 2007, p. 261, n° 84 et les références citées).

Les facilités de paiement octroyées par le juge de paix en matière de crédit à la consommation sont, à cet égard, assimilées aux délais de grâce (A. VAN QUICKENBORNE, Borgtocht, A.P.R., Story Scientia, 1999, p. 177, n° 332).

Il en va autrement lorsque les délais de paiement sont consentis en dehors de toute procédure par le prêteur au consommateur. Dans ce cas, eu égard à son caractère accessoire, la caution peut s’en prévaloir (C. BIQUET-MATHIEU, « Les sûretés personnelles », in Handboek consumentenkrediet, éd. E. Terryn, Die Keure, 2007, p. 260, n° 83). Tel n’est cependant pas le cas du codébiteur solidaire en vertu de l’article 1201 du Code civil.

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