VII.147/5 : Suspension des obligations jusqu'à livraison (CH)

VII.91 et VII.147/5 : Suspension des obligations jusqu'à livraison

 

 

Article VII.91 et Article VII.147/5

 

Article VII.91

Lorsque le contrat de crédit mentionne le bien ou la prestation de service financé ou que le montant du contrat de crédit est versé directement par le prêteur au vendeur ou prestataire de services, les obligations du consommateur ne prennent effet qu'à compter de la livraison du bien ou de la prestation du service; en cas de vente ou de prestation de services à exécution successive, elles prennent effet à compter du début de la livraison du produit ou de la prestation du service et cessent en cas d'interruption de celles-ci, sauf si le consommateur reçoit lui-même le montant du crédit et que l'identité du vendeur ou du prestataire de service n'est pas connue par le prêteur.

Le montant du crédit ne peut être remis au vendeur ou au prestataire de services qu'après notification au prêteur de la livraison du bien ou de la prestation du service.

La notification visée au deuxième alinéa est constitué sur un support durable, notamment un document de livraison, daté et signé par le consommateur.

L'intérêt dû en vertu du contrat de crédit ne prend cours qu'à la date de cette notification.

Principe et ratio legis

Les articles VII.91 et VII.147/5 font de la livraison du service ou du bien, une condition suspensive du contrat de crédit. L'hypothèse vise le contrat de crédit dans lequel le bien financé fait l'objet d'une mention expresse conformément à l'article VII.78, § 3, 2° [CC] ou VII.134, §3, 2° [CHDM].

Pour éviter l'application de cette disposition, il suffirait au prêteur de ne pas mentionner le bien lors de la remise de l'offre. C'est pourquoi la règle est complétée par un critère alternatif : le contrat de crédit sera également subordonné à l'exécution du contrat de vente ou de prestation de services chaque fois que le montant du prêt est versé, non au consommateur lui-même, mais au vendeur ou au prestataire de services.

En outre, pour éviter une collusion entre vendeur et prêteur, la déclaration de livraison ou de fourniture doit être signée par le consommateur. L'intérêt dû en vertu du contrat de crédit ne prendra cours qu'à la date de cette notification. (Exposé des Motifs, Doc.Parl, Sénat, 1989-1990,916-1, 22).

Selon le Conseil d'Etat (Avis du Conseil d'Etat, Doc. Parl, Sénat, 1989-1990, 916-1, p. 185), cette disposition vise autant les relations bipartites (consommateur avec un vendeur-prêteur) que tripartites (consommateur avec un vendeur - souvent intermédiaire de crédit - et prêteur) : L'article 19 [VII.91] dispose en substance que les engagements du consommateur ne deviennent exécutoires qu'à partir de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation. Cette règle vaut tant pour la relation bipartite que pour la relation tripartite, en supposant que, dans ce dernier cas, le montant du crédit soit directement versé au vendeur. L'exception de non-fourniture peut, en ce sens, être soulevée dans toute relation tripartite, et non seulement dans celle visée à l'article 24, à savoir celle où il existe une unité économique entre le vendeur et le prêteur

Cette disposition vaut donc pour les ventes à tempérament comme pour celles où de facto, le vendeur ou le prestataire de service a connaissance de l'existence du crédit puisqu'il est informé qu'il ne sera payé qu'après livraison ou fourniture du service sur présentation de l'attestation du consommateur.

La loi du 13 juin 2010 qui a transposé la directive 2008/48/CE a davantage précisé le champ d'application en écartant les cas où le prêteur ne peut, en aucun cas, savoir qui est le vendeur et encore moins quand la livraison aura lieu (Exposé des motifs, Doc. Parl., Chambre, Session 52, 2468/001, p. 43). Cette précision est ajoutée à la fin de l'alinéa 1er qui précise : sauf si le consommateur reçoit lui-même le montant du crédit et que l'identité du vendeur ou du prestataire de service n'est pas connue par le prêteur.

Le champ d'application de ces dispositions et le contrat de crédit lié

L'article VII.147/5 ne s’applique qu’au crédit hypothécaire à destination mobilière.

La disposition vise les hypothèses suivantes :

  1. le contrat de crédit mentionne le bien ou la prestation de service financé
  2. le montant du contrat de crédit est versé directement par le prêteur au vendeur ou prestataire de services

La disposition ne vise pas spécifiquement les contrats liés dont la définition est reprise à l'article I.9, 64° (voir le commentaire de cette disposition). Il convient donc d'apprécier le champ d'application de l'article' VII.91 et VII.134, § 3, 2° de manière autonome, indépendamment de la définition du contrat de crédit lié (ENGLEBERT M., "La crise du secteur des panneaux photovoltaïque : quelles conséquences pour les prêteurs et les emprunteurs.?", note sous Civ. Liège, 6 septembre 2016, J.L.M.B. 2018, 81, sp. note infrapaginale 4, p. 82).

Tout contrat de crédit lié, tombe dans le champ d'application de ces articles. Par contre ces articles peuvent s’appliquer à d'autres hypothèses que celles envisagées dans la définition du contrat de crédit lié : c'est ainsi par exemple qu'il n'est pas requis par l'article VII.91 que le contrat de crédit serve uniquement à financer l'achat du bien ou du service.

Voir également le commentaire sous l'article VII.78, § 3, 2° (CC) ou VII.134, § 3,2° (CHDM).

1ère hypothèse : le paiement du vendeur directement par le prêteur

Cette première hypothèse ne pose pas de problème d'interprétation. Le fait que le prêteur paie directement le vendeur montre que le prêteur connait le but du crédit, que le crédit sert à acheter un bien précis ou un service particulier et que le prêteur connait l'identité du fournisseur. Le champ d'application est ici délimité par un critère objectif : le paiement direct du prêteur au vendeur.

Même lorsque ce critère objectif est présent, une difficulté opeut se présenter quant à la validité de l'attestation de livraison signée par le consommateur. Il semble en effet que certains vendeurs soient suffisamment persuasifs pour faire signer une attestation par le consommateur alors même que le bien n'a pas encore été livré. Il revient alors au tribunal d'apprécier la portée du document et l'étendue du devoir de vérification du prêteur (voy. ENGLEBERT M., " Crédit lié au financement d'un bien ou d'un service particulier... une figure juridique complexe !", note sous Civ. Hainaut (Mons), 25 octobre 2017, J.L.M.B., 2019/18, 837, décision cassée par Cass. 28 mars 2019, JLMB 2019/18, 828; J.T., 2019, p. 403).

Le prêteur pourrait par ailleurs être tenté de minimiser les aléas de la livraison en imposant un paiement entre les mains du consommateur. Le prêteur priverait ainsi le consommateur de la protection que lui offre la loi. Cette attitude ne paraît pas conforme à l'obligation de fournir le type de crédit le mieux adapté compte tenu du but du crédit (articles VII.75 et VII.131). A minima, ceci imposerait au prêteur un devoir particulier d'information sur le droit du consommateur de refuser d'entamer le remboursement du crédit aussi longtemps que la livraison n'a pas eu lieu et sur le danger de payer avant la livraison (voy. ENGLEBERT M., " Crédit lié au financement d'un bien ou d'un service particulier... une figure juridique complexe !", op. cit., p. 852).

2ème hypothèse : le bien vendu est mentionné dans le contrat.

La deuxième hypothèse implique la mention de l'objet ou du service financé dans le contrat. Cette hypothèse pose la question de savoir si le prêteur est tenu de reprendre cette mention dans le contrat lorsqu'il sait que le crédit sert à acheter un bien ou un service. Une réponse positive s'impose par application des articles VII.75 et VII.131 : le devoir de conseil oblige le prêteur à choisir le type de crédit le mieux adapté compte tenu du but du crédit. Dès lors que le prêteur sait ou doit savoir que le crédit sert à financer l'achat d'un bien ou d'un service, la mention de celui-ci doit figurer dans le contrat de crédit. L'intermédiaire de crédit à par ailleurs l'obligation d'informer le prêteur sur le but du crédit et notamment de l'intervention éventuelle d'un vendeur sous-agent. La sanction de cette violation est édictée par l'article VII.195 (nullité du contrat ou réduction au pric comptant) mais le juge pourrait en outre sanctionner le manquement par une réparation en nature et autoriser le consommateur à suspendre tout paiement jusqu'à la livraison. (ENGLEBERT M., " Crédit lié au financement d'un bien ou d'un service particulier... une figure juridique complexe !", op.cit., 847)

Conséquence : la mise à disposition du crédit - même au consommateur - est retardée jusqu'à notification de la livraison.

En vertu de l'article VII.91, alinéa 2, le prêteur est obligé d'attendre que lui soit notifiée la livraison du bien pour libérer le montant financé en faveur du vendeur. Cette règle ne prévoit cependant que le cas où le prêteur remet le montant du crédit au vendeur. Quid s'il remet les fonds au consommateur ? Il faut alors distinguer si le prêteur connait (ou devait connaître) le but du crédit (le bien ou le service à financer) et le fournisseur (et donc le prix de vente au comptant). S'il a correctement exécuté son devoir de collecter les informations, le prêteur a obtenu ces informations du consommateur qu'il est tenu de mentionner dans le contrat de crédit (article VII.78, § 3, 2°). Dans ce cas, s'il n'est pas formellement interdit au prêteur de verser les fonds au consommateur sans attendre la notification de la livraison, le prêteur court le risque de ne pouvoir réclamer aucun remboursement au consommateur aussi longtemps que la livraison ne sera pas effectuée. Il court donc le risque de tout perdre si la livraison n'intervient jamais.

S'il n'a pas pu obtenir ces informations soit parce que le consommateur a volontairement celé ses intentions, soit parce que le choix de celui-ci n'était pas encore arrêté (par exemple quant au nom du fournisseur), le prêteur peut, sous réserve de son devoir de conseil (VII.75), verser les fonds directement au consommateur sans devoir attendre la notification de la livraison et sans risque à cet égard (ENGLEBERT M., "La crise du secteur des panneaux photovoltaïque : quelles conséquences pour les prêteurs et les emprunteurs.?", note sous Civ. Liège, 6 septembre 2016, J.L.M.B. 2018, 87).

Le juge de paix d'Enghien-Lens a appliqué l'article VII.91 dans une hypothèse où l'achat de panneaux photovoltaïques était repris dans le contrat de crédit sous la désignation "aménagement de maison", alors que le contrat de crédit précisait une condition suspensive de la remise de la "preuve de la destination des fonds" ce dont le juge déduisait que le prêteur a donc nécessairement eu, ou pu avoir, la facture du vendeur avant la remise des fonds de sorte qu'il ne pouvait y avoir aucune équivoque sur l'objet du crédit. Cette conclusion s'imposait d'autant plus que le montant du crédit correspondait exactement au coût de l'achat des panneaux (J.P. Enghien-Lens ,16 septembre 2014, J.M.L.B. 2016, 517).

En appel, le tribunal de première instance de Mons (TPI Hainaut (div. Mons), 23 octobre 2017, RG N°14/3596/A, inédit) suivra une autre argumentation et écartera l'application de l'article VII.91 (art. 19 LCC) au motif qu'il n'était pas établi, en fait, que le prêteur avait connaissance de l'existence du contrat de fourniture de panneaux photovoltaïques. Par contre, le tribunal estime qu'il est établi que l'agent par lequel l'intermédiaire de crédit a préparé le dossier de crédit et obtenu l'accord de la banque non seulement en avait connaissance, mais était à l'origine du système de contrats et le préparateur de tous les documents contractuels, agissant d'une part en qualité de gérant du fournisseur et d'autre part de sous-agent de l'intermédiaire de crédit. Le tribunal considère par contre que le contrat de crédit était un contrat lié au sens de l'article I.9, 64° (article 1, 20°, LCC), puisque le prêt servait exclusivement à financer un bien ou un service inconnu mais déterminé - ce qui se déduit ipso facto de la précision de son montant au centime près - et que les deux contrats constituent, d'un point de vue objectif, une unité commerciale, l'un n'allant pas sans l'autre. La loi répute en l'espèce cette unité commerciale parce que la préparation du contrat de crédit s'est faite grâce aux services du fournisseur. Le tribunal considère dès lors que l'intermédiaire de crédit a manqué à son obligation de fournir les explications adéquates notamment le fait que le consommateur ne bénéficiait pas de la protection légale instituée par l'article VII.91. Le tribunal prononce en conséquence la nullité du contrat de crédit sur base de l'article 86 LCC (VII.195, CDE) mais comme la nullité oblige le consommateur à restituer la somme prêtée, le tribunal estime que,en vue d'assurer l'effectivité de la sanction les consommateurs ne doivent pas réciproquement restituer le montant du crédit.

Dans une autre décision du 25 mars 2017 (RG n°16/1514/A, inédit), le tribunal du Hainaut (div. Mons) a considéré que l'article VII.91 s'appliquait dans un même cas de vente de panneaux photovoltaïques en relevant ici également le rôle prépondérant du fournisseur de panneaux dans la conclusion du contrat de crédit. Il estime que le prêteur connaissait le but du crédit. La décision souligne également que le prêteur avait l'obligation à l'instar de tout banquier normalement prudent placé dans les mêmes circonstances, de prendre des informations concrètes sur la destination d'une telle somme. Le tribunal considère qu'il importe donc peu que, par des artifices vraisemblablement mis en œuvre afin d'éluder la réglementation légale, le contrat de crédit litigieux ne détermine pas le but concret du prêt à tempérament et use cet égard d'un truisme ("prêt à tempérament /PAT - Action ") et que les fonds aient été mis à disposition non de Home Vision [le vendeur], mais des appelants , sans aucune maîtrise de leur part puisque les articles 3 et 4 du contrat d'investissement leur imposaient de les transférer à HOME VISION à très bref délai, indépendamment de la livraison de l'installation. Le prêteur n'a donc pu nourri aucun doute sur l'objet du crédit. Le tribunal considère ensuite que le contrat est devenu caduc de plein droit. Il prononce la libération les consommateursde toute obligation de remboursement.

L'analyse du juge de paix d'Enghien-Lens est partagée par le juge de paix du canton de Comines-Warneton (24 mai 2016, J.J.P. 2016, 504) pour un contrat de crédit ayant le même but dans lequel il était précisé "energy@home" alors que le montant du crédit correspondait exactement au prix de l’installation des panneaux photovoltaïques. Dans le même sens, le juge de paix de Seraing estime qu'il y a contrat de crédit lié et libère le consommateur des versements échus et non encore payés ainsi que des versements à échoir ((8 décembre 2016, inédit, RG n° 16A493) (en sens contraire : J.P. Thuin, 14 mars 2016, J.L.M.B. 2018, 66 alors pourtant que le fonds sont versés au fournisseur et que le contrat mentionne "isolation Solar and Co" ; J.P. Ath, 21 décembre 2015,J.M.L.B.2018, 62, et le commentaire critique de ENGLEBERT M., "La crise du secteur des panneaux photovoltaïque : quelles conséquences pour les prêteurs et les emprunteurs.?", note sous Civ. Liège, 6 septembre 2016, J.L.M.B. 2018, 81).

Ces interprétations sont conformes à l'intention du législateur telle qu'elle se trouve exprimée dans l'Exposé des motifs de la loi du 13 juin 2010 modifiant la loi du 12 juin 1991 relative au crédit à la consommation (Doc. Parl., Ch. Repr., Sess.52, 2468/001, p.43). S'y trouve exprimée le fait que l'exception ne s'applique que dans les cas où le prêteur ne peut, en aucun cas, savoir qui est le vendeur et encore moins quand la livraison aura lieu.

L'article VII.91 s'appliquera donc même si le contrat ne mentionne pas explicitement le bien ou le service financé, si le prêteur (ou l'intermédiaire) était,en mesure de connaître cette information et que l'absence de mention résulte en réalité, d'une négligence du prêteur ou de l'intermédiaire dans la collecte de l'information ou dans la rédaction du contrat. Lorsqu'il s'agit d'un contrat de crédit lié, les documents doivent comporter une rubrique spécifique avec la description du service à financer et son prix au comptant.

Le point de départ des obligations du consommateur

Le premier alinéa des dispositions commentées précise que les obligations du consommateur prennent cours à compter de la livraison du bien ou de la prestation du service ; il s'agit d'une condition suspensive.

Elle a pour conséquence que le prêteur ne peut remettre le montant du crédit au vendeur. comme déjà exposé s'il remet le montant du crédit au consommateur il ne pourra réclamer aucun remboursement aussi longtemps que la livraison n'a pas eu lieu.

Les dispositions ajoutent une condition complémentaire à l'article VII.90 (ou VII.147/3): la signature du contrat de crédit ne suffit pas, il faut en outre, une attestation de livraison du bien ou de prestation du service. Ce principe est confirmé par le dernier alinéa : l'intérêt dû en vertu du contrat de crédit ne prend cours qu'à la date de cette notification.

La sanction civile (VII.202 [CC] – VII.214/2 [CHDM]) prévoit par ailleurs que le consommateur est relevé des intérêts pour la partie des paiements effectués avant la livraison du bien ou la prestation du service, en violation des alinéas 1er et 4 des dispositions commentées. Cette sanction s'ajoute au mécanisme de l'article VII.91 qui interdit au prêteur de réclamer quel que remboursement que ce soit avant la livraison (Civ. Liège, 6 septembre 2016, J.L.M.B. 2018, 75).

Jugé que s'il adresse au prêteur une attestation de livraison signée par lui alors qu'en réalité la livraison n'est pas intervenue, le consommateur ne peut reprocher ensuite au prêteur d'avoir remis les fonds empruntés au vendeur conformément à ses propres instructions (J.P. Thuin, 14 mars 2016, J.L.M.B. 2018, 66 ; J.P. Ath, 21 décembre 2015, J.L.M.B. 2018, 62) ou d'avoir remis les fonds au consommateur lequel a payé à son tour le vendeur. Dans ce cas, le consommateur est tenu de rembourser le crédit et il doit supporter seul les conséquences de l'absence de livraison (J.P. Thuin, 14 mars 2016, J.L.M.B. 2018, 66 ; J.P. Ath, 21 décembre 2015, J.L.M.B. 2018, 62).

Service à prestations successives

En cas de vente ou de prestation de services à prestations successives, la loi précise que les obligations du consommateur prennent effet à compter du début de la livraison du produit ou de la prestation du service et cessent en cas d'interruption de celles-ci. C'est une dérogation au principe de la relativité des conventions (article 1165 Code civil). Si le contrat de vente à prestations successives prend fin, le contrat de crédit cesse pour le futur. Par contre, il subsiste pour la partie du crédit qui a été prélevée.

Le problème des biens à long délai de livraison (voitures, etc.)

Pour les biens dont le délai de livraison est variable, l'évolution des prix du producteur peut poser problème. Le montant du crédit doit être prévu dans le contrat de crédit et ne peut donc évoluer, même de l'accord des deux parties ou en fonction d'éléments extérieurs.

Pour la vente à tempérament et le crédit-bail, une solution consiste à faire de la livraison dans un délai déterminé, une condition résolutoire du contrat de crédit. Si la livraison n'intervient pas dans ce délai, la convention de crédit est résolue et la conclusion d'un nouveau contrat s'imposera.

Attestation de livraison

Si le prix est remis au vendeur, la loi impose que le prêteur reçoive au préalable une attestation de livraison signée de la main du consommateur : la notification visée au deuxième alinéa est constituée sur un support durable, notamment un document de livraison, daté et signé par le consommateur.

Le formalisme de la loi se limite à demander une mention datée et signée par le consommateur. Les travaux préparatoires relèvent qu'elle peut être apposée sur le bon de commande. Cette attestation doit être signée par le consommateur lui-même et non par un proche ou un voisin. Il incombe au prêteur de vérifier l'attestation qui lui est remise (Civ. Liège, 6 septembre 2016, J.L.M.B. 2018, 75). Comme le souligne M. ENGLEBERT ( "La crise du secteur des panneaux photovoltaïque : quelles conséquences pour les prêteurs et les emprunteurs.?", J.L.M.B. 2018, 88), il est important d'avoir à l'esprit que, dans certaines situations, de nombreux documents sont simultanément soumis à la signature du consommateur, lequel ne se rend pas toujours compte de la portée de ce qu'il signe. Afin de ne pas se voir reprocher une quelconque faute, sans doute est-il plus prudent pour le prêteur de vérifier la clarté et la transparence du document qui lui est remis afin de se convaincre que le consommateur a effectivement eu l'intention de lui notifier la livraison. Le tribunal de première instance de Liège relève une faute du prêteur qui n'a pas constaté que l'attestation remise était irréaliste au regard de la chronologie des prestations (Civ. Liège, 6 septembre 2016, J.L.M.B. 2018, 75). Si, néanmoins, le consommateur signe l'attestation alors que la livraison n'est pas intervenue, il doit supporter seul les conséquences découlant du fait que la livraison n'interviendra jamais en raison de la faillite du fournisseur (J.P. Thuin, 14 mars 2016, J.L.M.B. 2018, 66 ; J.P. Ath, 21 décembre 2015, J.L.M.B. 2018, 62; décisions critiquées par M. ENGLEBERT dans sa note précitée).

Le prêteur ne peut délivrer le montant du crédit au vendeur en se fondant sur une facture non signée par le consommateur ainsi que sur des documents complétés par le consommateur dans le seul but de bénéficier d'une bonification fiscale (Civ. Liège, 6 septembre 2016, J.L.M.B. 2018, 75, note ENGLEBERT M.).

Suspension du cours des intérêts et sanctions

Le dernier alinéa des dispositions commentées précise que l'intérêt dû en vertu du contrat de crédit ne prend cours qu'à la date de la notification de la livraison. Le prêteur qui par erreur, verserait le montant du crédit avant la livraison du bien ou la fourniture du service ne pourra donc pas prétendre aux intérêts rémunératoires (voir le commentaire de l'article VII.202).

En crédit à la consommation, le consommateur pourrait prétendre appliquer la sanction de l'article VII.198 (dispense de remboursement) si le paiement est intervenu avant la signature du contrat de crédit. En crédit hypothécaire, la sanction civile est prévue par l’article VII.214/2: Le consommateur est relevé des intérêts pour la partie des paiements effectués avant la livraison du bien ou la prestation du service, en violation de l'article VII.147/5, alinéas1er et 4.

S'il apparaît que la livraison ne pourra jamais avoir lieu, le contrat de vente doit être résolu et le prêteur ne pourra réclamer au consommateur le remboursement des sommes qu'il aurait versées au vendeur. Si le consommateur a payé les intérêts sur les sommes avant la livraison, il peut demander à en être relevé conformément à l'article VII.198 ou VII.214/2.

Avis de l'administration

  • La clause par laquelle le consommateur déclare avoir pris livraison du véhicule (avec date et signature) est contraire à l’article 19 LCC [VII.91] . Il faut en effet un écrit distinct du contrat.
  • Il ne peut être prévu d’une part que la mise à disposition des sommes empruntées est suspendue jusqu’à l’expiration du délai de l’article 18 [VII.83] (délai de réflexion) et d’autre part que le premier paiement doit intervenir 30 jours après la signature du contrat. Une telle stipulation est contraire à l’article 32, 4° LPPC [VII.83, 4°] car le prêteur décide unilatéralement quand la convention sera exécutée. Cela impliquerait dans les faits que des intérêts pourraient être calculés sur du capital non mis à la disposition du consommateur.
  • Le contrat qui précise que le consommateur remet un chèque représentant la première mensualité que le prêteur n'encaissera qu'un mois après la livraison ne satisfait pas à l'exigence de l'article 19 LCC [VII.91] : c'est la date de remise du chèque qui est déterminante et non la date de son encaissement.
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