VII.147/23 : Décompte en cas d'inexécution d'un contrat de crédit à destination immobilière

 

 

Article VII.147/23

 

Article VII.147/23

§ 1er. En cas de résolution du crédit hypothécaire avec une destination immobilière ou de déchéance du terme repris dans ce contrat de crédit, en raison de la non-exécution de ses obligations par le consommateur, aucun paiement autre que ceux indiqués ci-dessous ne peut être réclamé au consommateur:

- le solde restant dû;

- les intérêts de retard qui sont devenus exigibles conformément au § 2;

- les intérêts et frais échus et non payés qui sont devenus exigibles conformément au § 2;

- une indemnité au maximum égale à l'indemnité de remploi visée à l'article VII.147/12, § 1er, calculée sur le solde restant dû.

§ 2. En cas de simple retard de paiement d'un contrat de crédit hypothécaire avec une destination immobilière, qui n'entraîne ni la résolution du contrat, ni la déchéance du terme, aucun paiement autre que ceux indiqués ci-dessous ne peut être réclamé au consommateur:

1° le capital échu et impayé;

2° les frais et intérêts échus et impayés;

3° les intérêts de retard à concurrence de 0,5 % sur base annuelle calculés comme suit:

a) en cas de non-paiement des intérêts à l'échéance: le solde restant dû au moment du retard de paiement multiplié par le taux périodique qui correspond au taux débiteur de 0,5 %;

b) sur le capital impayé un intérêt de retard peut être calculé pro rata temporis au taux périodique du crédit, majoré d'un taux périodique qui correspond au taux débiteur de 0,5 %. Ces intérêts de retard commencent alors à courir à partir de la date de retard de paiement jusqu'au remboursement effectif;

4° les frais convenus de lettres de rappel et de mise en demeure, à concurrence d'un envoi par mois. Ces frais se composent d'un montant forfaitaire maximum de 7,50 euros augmenté des frais postaux en vigueur au moment de l'envoi. Le Roi peut adapter ce montant forfaitaire selon l'indice des prix à la consommation.

§ 3. Tout paiement réclamé en application des §§ 1er et 2 doit être détaillé et justifié dans un document remis gratuitement au consommateur. Un nouveau document détaillant et justifiant les montants dus en application des §§ 1er et 2 doit être remis gratuitement, au maximum trois fois par an, au consommateur qui en fait la demande. Le Roi peut déterminer les mentions de ce document et imposer un modèle de décompte.

§ 4. Est interdite et réputée non écrite, toute clause comportant, en cas de non-exécution de ses obligations par le consommateur, des pénalités ou des dommages et intérêts non prévus par le présent livre.

 

La règle générale (147/23, § 4)

 

Principe

L'article 147/23, § 4, édicte la règle générale : Est interdite et réputée non écrite, toute clause comportant, en cas de non-exécution de ses obligations par le consommateur, des pénalités ou des dommages et intérêts non prévus par le présent livre. Toute clause qui mettrait à charge du consommateur une indemnité non prévue est donc nulle.

Article VII.147/23, § 4 / article VII.213, al.1

L’article VII.147/23, § 4, ne vise qu’à sanctionner les clauses contractuelles ne respectant pas l’énumération limitative de l’article VII.147/23, § 1. Toute clause qui mettrait à charge du consommateur une indemnité non prévue est donc nulle.

Lorsqu’il constate pareille clause, le juge doit en prononcer la nullité. Il ne dispose à cet égard d’aucun pouvoir d’appréciation. L’article VII.147/23, § 4, ne vise qu’à sanctionner les clauses contractuelles ne respectant pas l’énumération limitative de l’article VII.147/23. En l’absence de clause contractuelle, la pratique consistant pour le prêteur à exiger une indemnité non reprise dans l’énumération limitative de l'article VII.147/23, tombe, quant à elle, dans le champ de l’article VII.213, alinéa 1er. En vertu de cette disposition, lorsque des pénalités ou des dommages et intérêts non prévus par la loi sont réclamés au consommateur, ce dernier en est entièrement relevé de plein droit.

Les sommes que le prêteur peut réclamer en cas d'inexécution

Alors que l'article VII.147/22 envisage les exceptions à cette règle pour trois hypothèses (résolution ou déchéance du terme, simple retard de paiement sans résolution du contrat et retard de paiement postérieur au terme normal du contrat de crédit), l'article VII.147/23 n'en envisage que deux : la résolution (ou déchéance du terme) (§ 1) et le simple retard de paiement (§ 2).

En cas de résolution du contrat de crédit hypothécaire avec une destination immobilière, le prêteur ne peut réclamer au consommateur aucun autre paiement que ceux énumérés l’article VII.147/23, § 1er, à savoir :

  • le solde restant dû;
  • les intérêts de retard qui sont devenus exigibles conformément au § 2;
  • les intérêts et frais échus et non payés qui sont devenus exigibles conformément au § 2;
  • une indemnité au maximum égale à l'indemnité de remploi visée à l'article VII.147/12, § 1er, calculée sur le solde restant dû.

Il résulte de la formulation de l'article VII.147/23, que le prêteur ne peut jamais réclamer d'intérêts en cas de retard de paiement de frais du crédit par le consommateur. Si toutefois le prêteur paie à la place du consommateur, des frais relatifs à un contrat annexé au contrat de crédit (par exemple une prime d'assurance), il se trouve subrogé dans les droits du tiers qu'il a payé. Le prêteur pourrait donc utiliser les clauses de ce contrat pour réclamer des intérêts de retard et des indemnités selon les modalités prévues par ce contrat pour le montant qu'il a payé.

Les intérêts de retard et pénalité doivent être prévus par une clause contractuelle

A la différence de l'article VII.147/22 qui vise explicitement les pénalités et les intérêts de retard convenus, l'article VII.147/23 se borne à énumérer les sommes que peut réclamer le prêteur. L'exigence qu'ils soient convenus, n'est reprise qu'au § 4, en ce qui concerne les frais de rappel. Est-ce à dire que les intérêts de retard au taux majoré et les indemnités peuvent être réclamés même en l'absence d'une disposition contractuelle, dans la limite de ce qu'autorise l'article VII.147/23? Une réponse négative paraît s'imposer. L'article VII.134, § 3, 15°, contient en tous cas, une obligation générale de préciser dans le contrat les autres clauses et conditions contractuelles qui ne seraient pas énumérées dans la liste des mentions obligatoires. En ce qui concerne l'indemnité forfaitaire, l'article VII.147/23, renvoie explicitement à l'article VII.147/12, § 1°, lequel requiert que l'indemnité ait été stipulée. Enfin, l'obligation de faire figurer dans le contrat un avertissement concernant les paiements manquants (VII.134, § 3, 8°) et l'obligation de préciser dans le SECCI à la section 13, les conséquences financières du non-respect des engagements liés au crédit hypothécaire, montrent que l'article VII.147/23 ne dispense pas le prêteur de prévoir, par des clauses adéquates, les sanctions de l'inexécution dans les limites de ce qu'il autorise (Voy. l'argumentation présentée par F.RENSON et C. BIQUET MATHIEU, "la défaillance du consommateur", in Le crédit hypothécaire au consommateur, ULg et UCL, Larcier, 2017, p. 430 et svtes).

La loi se limite à encadrer la liberté contractuelle. En l'absence de clauses pénales, le prêteur ne pourrait se fonder que sur le droit commun (intérêt de retard après mise en demeure et droit à la réparation du dommage résultant de l'inexécution d'une obligation contractuelle). Si les sanctions convenues sont inférieures aux maxima autorisés par la loi, le prêteur ne pourrait préférer l'application de la loi à la sanction contractuelle.

Cette disposition s'applique tant en ce qui concerne la mise en œuvre d'une clause résolutoire expresse que lorsque la résolution est prononcée comme sanction d'un manquement du consommateur alors qu'une clause déterminerait forfaitairement le dommage en pareil cas. Les frais ne couvrent cependant pas les dépens que le juge doit taxer dans son jugement sur demande du prêteur et les frais que la loi autorise de mettre à charge du consommateur en cas d'exécution forcée.

Pouvoir d'appréciation du caractère non excessif, ni injustifié des sanctions autorisées

Le fait que les pénalités contractuelles répondent en tous points aux exigences de l'article VII.147/23, ne signifie pas pour autant que le juge perde tout pouvoir d'appréciation. Au contraire, l'article VII.213 alinéa 2, accorde au juge, même en ce cas, un pouvoir d'appréciation : s'il estime que les pénalités ou les dommages intérêts convenus ou appliqués, notamment sous la forme de clause pénale, en cas d'inexécution de la convention, sont excessifs ou injustifiés, il peut d'office les réduire ou en relever entièrement le consommateur. La jurisprudence prononcée pour les contrats de crédit à la consommation peut être transposée aux crédits hypothécaires, les textes étant identiques.

Il s'agit ici autant des intérêts de retard que des pénalités proprement dites. Le caractère excessif ou injustifié s'apprécie non seulement par rapport au préjudice effectivement subi par le prêteur (et non seulement par rapport au préjudicie prévisible) mais également par référence à des circonstances extérieures aux parties et à la relation contractuelle, comme la situation malheureuse du consommateur de bonne foi. Il a été ainsi jugé qu'une pénalité est excessive lorsqu'elle est disproportionnée par rapport au manquement ou au dommage subi. Elle est injustifiée lorsque l'emprunteur se trouve dans des difficultés financières résultant de circonstances extérieures à sa volonté (Anvers, 27 novembre 2006, Ann. Crédit 2006, 112). Cette jurisprudence a été consacrée par un arrêt de Cassation (Cass. 5 mars 2004, N.J.W., 2004, p. 595, et note R; STEENNOT, Ann. Crédit., 2003, p. 89, note M. DAMBRE).

Application résiduaire du livre VI - réciprocité et clauses pénales excessives

 

Réciprocité des clauses pénales - Application du livre VI aux crédits réglementés

Une clause pénale conforme aux exigences de l’article VII.106 et VII.147/22 doit également respecter les articles VI.83,17° et VI.83,24° du CDE

L'article VI.83, 17° et les crédits réglementés

L’article VI.83, 17°, prohibe la clause qui a pour objet de « déterminer le montant de l'indemnité due par le consommateur qui n'exécute pas ses obligations, sans prévoir une indemnité du même ordre à charge du vendeur qui n'exécute pas les siennes ».

L’application de cette disposition est souvent problématique compte tenu de ce que les obligations mises à charge du professionnel diffèrent généralement sensiblement de celles supportées par le consommateur. Concevoir des clauses pénales analogues dans le chef de l’un et l’autre peut donc susciter des difficultés. Le principe est néanmoins que les dispositions générales du livre VI (comme du code civil) s’appliquent en matière de crédit à la consommation pour autant qu’elles ne soient pas incompatibles avec les dispositions spécifiques du régime spécifique auxquels ces crédits sont soumis.

Ces difficultés ne sont toutefois pas nécessairement plus importantes dans le cadre d’un crédit réglementé que dans le cadre d’un autre contrat, tel qu'une vente mettant en présence un professionnel et un consommateur. La règle de la réciprocité n’est donc pas incompatible avec le régime des crédits des réglementés et doit être respectée en cette matière comme dans tout autre ( voy. par exemple J.P. Termonde, 2 février 2016, Ann. Jur. 2016, p.159; J.P. Wavre (2e cant.), 22 décembre 2015, J.J.P., 2016, p. 432-435; C. BIQUET-MATHIEU, « La loi du 12 juin 1991 et les clauses abusives en matière de crédit à la consommation », in La promotion des intérêts des consommateurs au sein d’une économie de marché, 1993, pp. 16-17 ; R. STEENOT, « Consumentenkredietovereenkomsten. Ontbinding ingevolge wanprestatie van de consument », NjW, 2006, p. 58 ; S. STIJNS, E. SWANEPOEL, « Onrechtmatige bedingen », in Handboek consumentenkrediet, ed. Terryn, Die Keure, 2007, p. 198). Ainsi, une clause pénale pourrait être prévue, dans un prêt à tempérament, pour sanctionner le prêteur en défaut ou en retard dans le versement du montant du crédit ou, dans une ouverture de crédit, en cas de refus ou de retard dans la mise à disposition du crédit conventionnellement promis, etc.

Jugé que la réciprocité des clauses pénales requise par l'article VI.83, 17° CDE, doit concerner les obligations caractéristiques du prêteur tout au long de l'exécution du contrat : devoir d'information, mise à disposition du montant du crédit, suivi en cas d'exercice du droit de rétractation ou du droit au remboursement anticipé, traitement des données personnelles... Il ne suffit pas au prêteur de prévoir une clause pénale pour le cas où le crédit serait résolu en raison d'une faute ou négligence du bailleur. Pour qu'il soit satisfait à l'exigence de réciprocité, il faut en outre que la clause pénale à charge du prêteur soit du même ordre que celle à charge du consommateur. Tel n'est pas le cas lorsque la clause pénale à charge du prêteur ne prévoit la débition que du seul intérêt débiteur contractuel alors que les clauses pénales à charge du consommateur prévoient un taux d'intérêt majoré et une majoration forfaitaire du solde dû (J.P. Wavre (2e cant.), 22 décembre 2015, J.J.P., 2016, p. 432-435).

Lorsqu'il constate qu'il n'y a pas de réciprocité, le juge en prononce la nullité et le juge doit soulever l'incident d'initiative conformément aux arrêts de la CJUE (J.P. Termonde, 2 février 2016, Ann. Jur. 2016, p.159).

Le juge peut-il substituer à la clause abusive écartée une disposition de droit supplétif ? Si l'on considère le but dissuasif que doit poursuivre la sanction des clauses abusives (comme le rappelle la jurisprudence de la CJUE), il paraît à présent clair que le juge national qui annule une clause abusive doit écarter purement et simplement le droit supplétif. Il peut toutefois être dérogé à cette règle lorsque l'inapplication du droit national supplétif aboutit à placer le consommateur dans une situation plus défavorable que celle dans laquelle il se trouverait ensuite de l'annulation de la clause abusive (DELFORGE C. et BIQUET-MATHIEU C., «La théorie des clauses abusives», in «Clauses abusives et pratiques réglementées», Crédit aux consommateur et aux P.M.E., CUP, Larcier, 2016, vol.170, p. 292 qui citent PEERAER F., «Het volledig verbod op herziening van onrechtmatige bedingen : de botte bijl van het Hof van Justitie», R.G.D.C., 2014, pp. 328-329 ; GEIREGAT S., «Verfijning van transparantievereiste en duiding van de rol van aanvullend nationaal recht in het EU-recht inzake oneerlijk bedingen », R.G.D.C., 2015, p. 162).

L'article VI.83, 24° et les crédits réglementés

L’article VI.83, 24, prohibe la clause qui a pour objet de « fixer des montants de dommages et intérêts réclamés en cas d'inexécution ou de retard dans l'exécution des obligations de l'acheteur qui dépassent manifestement l'étendue du préjudice susceptible d'être subi par le vendeur ». Le caractère indemnitaire s'apprécie au moment de la conclusion du contrat. Les articles VII.106 et VII.147/22 dérogent à un double titre à cette règle : d'une part, ils déterminent les clauses pénales admises, ce qui de facto revient à leur reconnaître un caractère indemnitaire et d'autre part, les articles VII.199 et . VII.213, alinéa 2, permettent au juge d'atténuer les conséquences de l'inexécution pour le consommateur en ce compris les pénalités et indemnités contractuellement prévues et ce quand bien même, leur caractère indemnitaire au moment de la rédaction du contrat ne serait pas contestable mais leur application dans le cas d'espèce apparaîtrait excessive ou injustifiée.

VII.147/23, § 1 - Les sommes dues en cas de résolution ou de déchéance du terme

Le solde restant dû

Selon l'article I.9, 63°, le solde restant dû est le montant à verser en principal pour amortir ou rembourser le capital. Selon l'article I.9, 60° le capital est

(1) la dette en principal sur lequel porte le contrat de crédit.

(2)Pour les facilités de découvert et les dépassements sans modalités de remboursement échelonné du principal : le montant prélevé par le consommateur, augmenté des intérêts débiteurs échus et, en cas de simple retard de paiement tel que visé à l'article VII.106, § 2, des intérêts de retard échus sur le montant en dépassement

Dans l'hypothèse (1) ci avant, le prêteur ne peut réclamer comme solde restant dû que le capital au sens strict. L'article VII.147/23 interdit donc de réclamer à titre d'indemnité, l'intégralité des mensualités à échoir.

Les intérêts et frais échus et non payés qui sont devenus exigibles

Le prêteur peut réclamer les intérêts et les frais échus et impayés. Il s'agit des intérêts de retard, frais de rappel, pénalités et frais venus à échéance avant la résolution du contrat. Il s'agit de toutes les sommes autre que le capital que le prêteur peut réclamer en cas de retard simple de paiement comme envisagé au § 2 de l'article VII.147/23.

L'intérêt de retard

Les modalités de calcul imposées par le Code

Le législateur intervient pour limiter l'intérêt de retard sous plusieurs aspects :

  • Aucun autre intérêt ne peut être réclamé que celui qui est prévu à l'article VII.147/23.
  • L'intérêt ne peut être calculé que sur le solde restant dû c'est-à-dire sur le capital que le consommateur reste devoir. Cette disposition interdit de calculer l'intérêt de retard sur la totalité des termes impayés (composés pour une partie du coût total du crédit et donc d'intérêts).
  • Le taux d'intérêt de retard convenu ne peut dépasser le taux périodique majoré d'un taux périodique qui correspond à un taux débiteur annuel de 0,5%.

Point de départ du calcul des intérêts

L'intérêt de retard est dû à partir de la date de retard de paiement jusqu'au remboursement effectif ou en cas de simple retard de paiement; Cette disposition a-t-elle pour effet de faire courir les intérêts de plein droit à compter de la date du retard de paiement ? En d'autres termes, l'article VII.147/23, § 2, 3, b), dispense-t-il de l'envoi d'une mise en demeure. En dépit du silence du texte, cette interprétation doit être écartée (en ce sens, F.RENSON et C. BIQUET MATHIEU, "la défaillance du consommateur", in Le crédit hypothécaire au consommateur, ULg et UCL, Larcier, 2017, p. 433). A défaut de clause, le droit commun de l'article 1153 du Code civil s'appliquera et les intérêts seront dus à partir de la mise en demeure, au taux légal. L'article 1153 s'appliquera parfois concomitamment avec la clause contractuelle par exemple si celle-ci ne règle que le taux de l'intérêt de retard sans prévoir la dispense de mise en demeure. Dans ce cas l'intérêt de retard prendra cours après la mise en demeure adressée par le créancier.

En ce qui concerne les montant de termes impayés au jour de la résolution ou de la déchéance du terme, les intérêts de retard simples au sens de l'article VII.147/23, § 2, seront calculés jusqu'au jour de la déchéance ou de la résolution sur la part en capital des termes échus et impayés. A compter du jour de la résolution ou de la déchéance du terme, les intérêts de retard au sens de l'article VII.147/23, § 1, seront calculés sur l'intégralité du solde restant dû.

Méthode de calcul

L'intérêt de retard doit être calculé pro rata temporis au taux périodique du crédit, majoré d'un taux périodique qui correspond au taux débiteur de 0,5 %. Cette majoration se calcule sur base annuelle, soit un taux de 0,4157 % sur base mensuelle.

Interdiction de la capitalisation des intérêts

L'article VII.147/23, § 2, interdit implicitement toute forme de capitalisation des intérêts. Le calcul doit être fait sur le capital impayé (VII.147/23, § 2, 3,b) ou sur le solde restant dû (VII.147/23, § 2, 3°, a). Le solde restant dû est défini à l'article I.9, 63°, comme le montant à verser en principal pour amortir ou rembourser le capital. Une clause qui autoriserait le prêteur à procéder à la capitalisation des intérêts dans les formes autorisées par l'article 1154 du Code civil sera considérée comme nulle.

D'une part, une convention de capitalisation ne peut être conclue qu'a posteriori, une fois les intérêts échus pour une année. Par ailleurs, l'article VII.147/23 - d'ordre public - n'autorise le calcul que sur le solde restant dû. Le Code déroge donc à l'article 1154 du Code civil.

Ceci vaut pour les clauses contractuelles mais également pour l'autre technique de capitalisation autorisée par l'article 1154. Le prêteur ne pourrait donc une fois les intérêts échus, recourir à la capitalisation par sommation (exploit d'huissier ou conclusions déposées).

Exception

Il existe toutefois une exception explicitement prévue par l'article I.9, 60°, du Code. Pour les facilités de découvert et les dépassements sans modalités de remboursement échelonné du principal, le capital est défini comme le montant prélevé par le consommateur, augmenté des intérêts débiteurs échus et, en cas de simple retard de paiement tel que visé à l'article VII.147/23, § 2, des intérêts de retard échus sur le montant en dépassement. Cette exception est due au lien étroit entre ces ouvertures de crédit et un compte courant qui enregistre toutes les opérations du consommateur (et pas simplement les prélèvements/remboursements de crédit). De facto, il s'agit de comptes que seuls peuvent tenir les établissements de crédit soumis au contrôle de la Banque nationale. L'exception ne vaut que pour les intérêts échus au jour de la dénonciation du crédit. Les intérêts qui viennent à échéance après la dénonciation ne pourront être intégré au solde restant dû.

L'intérêt de retard sur les pénalités

La formulation de l'article 147/23 interdit la débition d'intérêts sur tous accessoires, qu'il s'agisse non seulement d'intérêts mais encore de frais ou de montants stipulés à titre de clause pénale; ainsi des intérêts de retard ne peuvent être réclamés, ni sur la clause de majoration forfaitaire en cas de dénonciation du crédit, ni sur les frais convenus de lettres de rappel en cas de simple retard de paiement.

Les pénalités ou indemnités convenues

Principe

L'intérêt de retard indemnise le prêteur du retard dans l'exécution de la convention par le consommateur. Les pénalités et indemnités convenues indemnisent le prêteur des conséquences de l'inexécution. Il s'agit de couvrir les frais de gestion d'une créance contentieuse et les démarches tendant à en assurer le recouvrement. Il s'agit donc de deux préjudices distincts.

Le Code limite le pouvoir de fixer forfaitairement le montant de l'indemnité prévue en cas d'inexécution en calquant cette indemnité sur l'indemnité de remploi fixée à l'article VII.147/12, § 1er. L'article 147/12 précise que le prêteur a droit à une indemnité pour la perte de jouissance résultant du remboursement anticipé. L'indemnité doit être calculée au taux périodique, sur le montant du solde restant dû et ne peut dépasser trois mois d'intérêt.

Cette estimation forfaitaire du dommage, dans la limite fixée par le Code, ne vaut évidemment que pour autant qu'une clause le prévoie. A défaut, le prêteur pourra demander la réparation de son préjudice conformément au droit commun que le Code n'écarte pas.

L'indemnité est forfaitaire et couvre tout le préjudice

La somme forfaitaire maximum que la loi permet de réclamer en cas de résolution ou de déchéance couvre tout le préjudice subi par le prêteur en raison de l'inexécution. Cette indemnité couvre par exemple :

  • les frais de lettres recommandées que le prêteur estimerait devoir adresser après la résolution ou la déchéance du terme;
  • les frais de récupération du bien affecté de la réserve de propriété même s'il s'agit d'une vente à tempérament (la vente n'est pas distincte du crédit);
  • les frais de recherche d'adresse, de recherches hypothécaires ou cadastrales, etc.
  • les frais de recherches domiciliaires.

Pénalités et dépens judiciaires

Si une action judiciaire est exercée, le prêteur peut demander la condamnation du consommateur aux frais et dépens de cette action. Ils doivent être taxés par le juge selon les dispositions légales en vigueur. Les dépens indemnisent le demandeur du préjudice spécifique résultant de l'obligation d'agir en justice. Le contrat de crédit ne peut conventionnellement ajouter d'autres pénalités du fait de l'action judiciaire. Une telle disposition est en effet interdite par la formulation de l'article VII.147/23 qui interdit de réclamer aucun autre paiement que ceux qui sont énumérés.

VII.147/23, § 2 : Le simple retard de paiement

Principe

L'article VII.147/23, § 2, vise le simple retard de paiement c'est-à-dire le retard enregistré sans qu'il y ait résolution du contrat ou déchéance du terme.

Le Code autorise le prêteur à stipuler dans le contrat une clause prévoyant au maximum de réclamer au consommateur les sommes suivantes :

  • le capital échu et impayé;
  • les frais et intérêts échus et impayés;
  • le montant de l'intérêt de retard à concurrence de 0,5 % sur base annuelle et calculé :

    a) en cas de non-paiement des intérêts à l'échéance : le solde restant dû au moment du retard de paiement multiplié par le taux périodique qui correspond au taux débiteur annuel de 0,5 %;

    b) sur le capital impayé un intérêt de retard peut être calculé pro rata temporis au taux périodique du crédit, majoré d'un taux périodique qui correspond au taux débiteursur base annuelle de 0,5 %. Ces intérêts de retard commencent alors à courir à partir de la date de retard de paiement jusqu'au remboursement effectif;

Le capital échu et impayé

En cas de simple retard de paiement, le prêteur peut évidemment réclamer au consommateur le paiement immédiat des termes de paiement échus et restée impayés. Très souvent il s'agit de mensualités qui comprennent le capital échu et impayé ainsi que les intérêts rémunératoires échus et impayés.

Les frais impayés

Ce poste couvre les frais venus à échéance avant la résolution et qui restent impayés. Il pourrait s'agit par exemple d'une prime d'assurance. Les frais visés au paragraphe 1er, tiret 2, concernent surtout le paiement d’une prime d’assurance éventuelle avancée par le prêteur (Exposé des motifs,Doc. Parl., Ch. Repr., sess. 2015-2016, 54, 1685/1, p. 53).

Le montant de l'intérêt de retard

Principe

L'article VII.147/23, § 2, envisage deux formes d'intérêts de retard en cas de simple retard de paiement :

  • Il s'agit d'abord d'une indemnité ou d'une pénalité pour le non paiement des intérêts échus qui est calculée sur le capital échu et à échoir jusqu'à la résolution du contrat. Il ne s'agit donc pas d'un intérêt de retard et l'appellation utilisée par le Code est inadéquate.
  • Il s'agit ensuite des intérêts de retard pour le non paiement du capital échu, calculés pro rata temporis sur la partie du capital échue et restée impayée.

Il résulte de la formulation de l'article VII.147/23, que le prêteur ne peut jamais réclamer d'intérêts en cas de retard de paiement de frais du crédit par le consommateur. Si toutefois le prêteur paie à la place du consommateur, des frais relatifs à un contrat annexé au contrat de crédit (par exemple une prime d'assurance), il se trouve subrogé dans les droits du tiers qu'il a payé. Le prêteur pourrait donc utiliser les clauses de ce contrat pour réclamer des intérêts de retard et des indemnités selon les modalités prévues par ce contrat pour le montant qu'il a payé.

L'intérêt de retard

L'intérêt de retard stricto sensu, est donc calculé pro rata temporis. Si les clauses contractuelles le prévoient (cfr ci-dessus), l'intérêt de retard peut être calculé à partir de la date de retard de paiement jusqu'au remboursement effectif, le cas échéant de plein droit et sans mise en demeure (dans la limite de ce que prévoit le contrat). La disposition commentée fixe un taux maximum. Le taux est celui du taux périodique majoré de l'équivalent en taux périodique du taux de 0,5% en base annuelle. Ces intérêts ne peuvent être calculés que sur la partie du capital échue et impayée (sur le capital impayé).

La pénalité en cas de simple retard de paiement

La pénalité est appliquée sur le solde restant dû au moment du retard de paiement multiplié par le taux périodique qui correspond au taux débiteur de 0,5 %.

Cette pénalité s'appliquera si les intérêts compris dans un terme de paiement viennent à rester impayés et sera calculée sur le solde restant dû à ce moment.

L'exposé des motifs de la loi du 22 avril 2016 fournit l'exemple suivant :

En ce qui concerne la disposition au paragraphe 3°, a), l’exemple suivant peut être donné: 0,042 % (taux d’intérêt périodique) x 150 000 = 63 euros. Ce montant est une pénalité qui peut être facturée en plus du taux d’intérêt contractuel ‘ordinaire’ conformément à l’article 1907, alinéa 3 CC et est calculée sur le solde restant dû au moment du défaut de paiement. Le taux d’intérêt débiteur est toujours réputé être exprimé sur base annuelle. En réalité, on reprend ici les dispositions de l’article 1907ter mais la méthode de calcul est précisée.
(Doc. parl., Ch. Repr., sess. 2015-2016, n° 54-1685/1, p. 53).

Les frais convenus de lettres de rappel et de mise en demeure, à concurrence d'un envoi par mois

Le Code autorise le prêteur à réclamer des frais du fait de l'envoi de rappels de paiement ou de mise en demeure. Ces frais ne peuvent être réclamés que pour autant qu'une disposition expresse du contrat le prévoie (les frais convenus).

Par ailleurs la loi place une double limite. Le montant des frais est fixé et d'autre part, le prêteur ne peut compter ces frais qu'à concurrence d'un envoi par mois. Il est sans importance que les lettres de rappel ou de mise en demeure portent sur une ou plusieurs échéances impayées, le prêteur ne peut réclamer des frais que pour une seule lettre de rappel ou de mise en demeure sur une période d’un mois, à compter de date en date.

Rien n'interdit au prêteur d'adresser davantage de rappels mais il le fera à ses frais, sans pouvoir réclamer de compensation au consommateur. Le délai d'un mois prend cours à compter de l'envoi précédent (voir exemple de calcul des frais de rappel et de mise en demeure). Une lettre de rappel ne se confond pas le relevé mensuel visé par l’article VII.147/14.

Le régime de l'article VII.147/23 étant inspiré de celui applicable au crédit à la consommation, il faut considérer que les frais de rappel ne sont autorisés que pour la période qui précède la résolution du contrat de crédit hypothécaire à destination immobilière.

Le simple retard suivi d'une dénonciation du contrat - cumul de sanctions

Les frais dus pour la période précédant la résolution ou la déchéance restent dus en cas de dénonciation ultérieure ou de résolution. Par contre, les frais de lettre de rappel ou de mise en demeure exposés après la dénonciation sont compris dans l'indemnité forfaitaire et ne peuvent donc être imputés en sus au consommateur.

Pluralité de débiteurs

S'il y a plusieurs codébiteurs, le coût de la mise en demeure adressée à chacun peut leur être imputée dans les limites de la loi mais il ne peut être imputé qu'au destinataire. Si une lettre unique est adressée à un consommateur pour plusieurs contrats en défaut, les frais ne peuvent être comptés qu'une seule fois. Si une lettre spécifique est adressée pour chaque contrat, les frais peuvent être comptés par contrat.

Imputation des paiements

A la différence de ce que prévoit l’article VII.147/22 pour les crédits hypothécaires à but mobilier, les crédits hypothécaires à but immobilier restent soumis au droit commun de l’article 1254 du Code civil en ce qui concerne l’imputation des paiements. Cette différence n'est pas expliquée dans les travaux préparatoires.

Devoir d’information

La loi impose au prêteur qui réclame une somme en exécution de l'article VII.147/23, § 1, ou § 2 de détailler et justifier sa demande dans un document remis gratuitement au consommateur. Un nouveau document détaillant et justifiant les montants dus en application des §§ 1er et 2 doit être remis gratuitement, au maximum trois fois par an, au consommateur qui en fait la demande.

Remonter