L'agent à titre accessoire en crédit à la consommation

Définition

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Commentaire

Genèse

La directive 2008/48/CE envisage (sans la définir comme telle) une catégorie d’intermédiaire qualifiée d’intermédiaire à titre accessoire.

Le considérant (24) précise:

(…) Toutefois, si des fournisseurs de biens ou de services agissent en qualité d'intermédiaires de crédit à titre accessoire, il ne convient pas de leur imposer l'obligation légale de fournir l'information précontractuelle prévue par la présente directive. Les fournisseurs de biens et de services peuvent par exemple être considérés comme agissant en tant qu'intermédiaires de crédit à titre accessoire si leur activité à ce titre ne constitue pas le principal objectif de leurs activités commerciales ou professionnelles.

Il s’agit donc de fournisseurs de biens ou de services pour lesquels l’activité de courtage en crédit est accessoire à une activité de vente ou de distribution de biens ou services. Ces intermédiaires se distinguent d’autres intermédiaires, agents ou courtiers, dont l’activité principale consiste à négocier et permettre la conclusion de contrats des crédits. Pour ces intermédiaires à titre accessoire, la directive (article 7) supprime le devoir d’information précontractuelle parce qu’un niveau suffisant de protection du consommateur est assuré puisque le prêteur a la responsabilité de veiller à ce que le consommateur reçoive une information précontractuelle complète, soit de l’intermédiaire, si le prêteur et l’intermédiaire en conviennent ainsi, soit d’une autre manière appropriée (Considérant 24 directive 2008/48/CE). C’est la seule spécificité de cette catégorie d’intermédiaires. Aucune définition ne figurait dans la LCC. La définition a été ajoutée lors de l'insertion des dispositions de la LCC dans le CDE par la loi du 19 avril 2014. L'exemption est reprise à l’article VII.72, CDE. L’article VII.72 s’applique aux prêteurs assimilés par la loi belge aux intermédiaires de crédit.

Activité complémentaire

L'intermédiation doit donc être une activité complémentaire à une autre qu'elle veut favoriser. Si le crédit est offert indépendamment de la vente du bien ou du service, ou qu'il ne tend pas à financer ces ventes, il ne s'agit plus d'une activité complémentaire. La distribution du crédit devient une activité autonome. C'est alors une activité commerciale à part entière qui s'ajoute à la vente des autres biens ou services de l'intermédiaire. C'est le sens de la première exception précisée à l'article VII.72, alinéa 2: lorsque l'intermédiaire de crédit propose à la fois un contrat de crédit et un instrument de paiement qui peut s'utiliser hors de son entreprise, il n'est pas un intermédiaire à titre accessoire. L'offre de crédit devient une activité principale et le crédit a une fonction indépendante de la vente des biens de l'intermédiaire. C'est un service ou produit au même titre que les autres.

L'exposé des motifs de la loi du 13 juin 2010 précisait à cet égard: Sont ici très certainement visés le commerçant ou le garagiste dont l’activité principale est la vente de biens ou la fourniture de services et qui dirige ses clients, pour les financements qui en découlent, vers des intermédiaires de crédit ou des prêteurs déterminés. Cependant, cela semble être moins, voire pas du tout, le cas des grandes surfaces et des sociétés de vente par correspondance qui promeuvent systématiquement des produits de crédits propres à leur entreprise et imposent aux consommateurs concernés des sociétés de financement ou des prêteurs déterminés. (...)Si un vendeur de biens ou de services propose une carte de paiement, une carte accréditive ou une carte multifonctionnelle lors d’une ouverture de crédit ou propose un financement pour voiture alors qu’il ne vend lui-même aucune voiture, cela dépasse la simple médiation en tant qu’activité accessoire (Exposé des motifs, Doc. Parl., Chambre, Session 52, 2468/001, p. 35).

Une activité accessoire n’est pas une offre systématique

Comme le relèvent Michiel DE MUYNCK et Reinhard STEENNOT, il faut donc également considérer que ne peuvent être considérés comme intermédiaires de crédit à titre accessoire, que les fournisseurs de biens et services pour lesquels l'activité d'intermédiaire n'a qu'une faible influence (geringe invloed) sur l'activité commerciale (De nieuwe wet consumentenkrediet en kredietopeningen: een afdoende bescherming voor de consument ?, R.D.C. 2011/3, p.191 et sp. 205). Si le financement de l'achat est proposé de manière systématique et fait partie de la stratégie commerciale et de la communication publicitaire de l'intermédiaire, il ne saurait plus être question d'une activité accessoire. Ce que l'intermédiaire offre sur le marché, c'est un produit (ou service) à crédit ou une offre conjointe produit (service) + crédit. Le crédit devient donc une partie de l'activité principale de l'entreprise. La définition s'inscrit dans cette logique: elle vise les vendeurs de biens et de services à caractère non financier. Si l'activité consiste à distribuer des produits financiers, l'intermédiation en matière de crédits ne peut plus être accessoire. Un courtier de crédit ne peut donc jamais être un agent à titre accessoire.

Le crédit doit permettre exclusivement la vente de biens et services de l'intermédiaire

L'activité ne peut être accessoire que si elle sert à réaliser l'achat de biens ou services offerts par l'intermédiaire. Si elle ne sert pas à cela, elle n'est pas une activité accessoire mais un service en soi. Qu'elle ne puisse servir que partiellement à acheter les biens et services offerts en vente par l'intermédiaire semble indiquer qu'elle pourrait avoir en outre une autre fonction, par exemple d'ouverture de crédit. Dans l'interprétation du législateur belge (la directive ne contient pas cette précision) reprise à l'alinéa 2 de l'article VII.72, cette fonction complémentaire ne peut en tous cas s'exercer que dans l'entreprise de l'intermédiaire. Le mot partiellement est néanmoins malheureux. Si le crédit est un produit en soi, c'est à dire qu'il ne sert pas exclusivement à financer la vente des produits et services de l'intermédiaire, ce n'est plus une activité accessoire. Le crédit fait alors tout simplement partie des biens et services que l'intermédiaire distribue sur le marché. Cela fait partie de son activité commerciale.

Le crédit pour financer l'acquisition d'un bien ou d'un service peut constituer un crédit hypothécaire s'il est assorti d'une sûreté hypothécaire. Le statut d'intermédiaire à titre accessoire pourrait donc, de manière marginale, s'appliquer aux intermédiaires en crédits hypothécaires. Toutefois, cette éventualité est écartée (implicitement) par l'article VII.180, § 4.

L’exception de l’article VII.72

Le texte de l'article VII.72:

Article VII.72

Les articles VII.70, VII.71, VII.74 et VII.75, ne s'appliquent pas aux fournisseurs de biens ou aux prestataires de services agissant en qualité d'agent à titre accessoire. La présente disposition ne porte pas atteinte à l'obligation du prêteur de veiller à ce que le consommateur reçoive de manière effective les informations précontractuelles visées aux dits articles.

L'alinéa 1er ne s'applique pas à l'agent à titre accessoire qui propose à la fois un contrat de crédit et un instrument de paiement pouvant s'utiliser hors de son établissement ou un contrat de crédit qui n'est pas destiné, totalement ou partiellement, à l'achat de biens ou services offerts par lui

Cette disposition apporte une exception au principe général selon lequel les devoirs d’information et de conseil des articles VII.70, VII.71, VII.74 et VII.75 incombent autant aux prêteurs qu’aux intermédiaires. Les professionnels sont donc solidaires à l’égard du consommateur de la bonne exécution de ces obligations. Cette règle générale se fonde sur la considération que le besoin d’information et de conseil est constant, que le consommateur contracte au travers d'un intermédiaire ou directement avec le prêteur.

L’exception introduite par l’article VII.72 ne porte que sur (1) les informations à communiquer au consommateur, (2) le devoir de fournir des explications complémentaires et (3), le devoir de conseil. Les agents à titre accessoire restent donc responsables avec les prêteurs de la bonne exécution du devoir inscrit à l’article VII.69 de recueillir toutes les informations nécessaires pour apprécier l’opportunité du crédit. La négligence de l’agent qui omet de poser une question sur les revenus et charges du consommateur ou de compléter adéquatement un formulaire de demande de crédit engagera donc sa responsabilité, comme celle du prêteur qui accepte de statuer sur base de renseignements incomplets.

Ces principes ont été rappelés par la CJUE dans un arrêt du 8 décembre 2016 (voir les attendus pertinents) Affaire C-127/15 - Arrêt de la Cour (troisième chambre) du 8 décembre 2016 - Verein für Konsumenteninformation contre INKO, Inkasso GmbH ).

Le prêteur reste tenu de fournir l'information et le conseil

L'article VII.72 précise par ailleurs que la dispense accordée à l’agent à titre accessoire ne porte pas atteinte à l'obligation du prêteur de veiller à ce que le consommateur reçoive de manière effective les informations précontractuelles visées auxdits articles.

Comment un prêteur qui, par hypothèse, n'a de contact qu'avec l'agent, peut-il s'assurer que l'information est remise en temps utile au consommateur et que par ailleurs, le devoir de conseil est adéquatement rempli?

Selon l'exposé des motifs il faut s’attendre à ce que cette disposition entraîne des conséquences très importantes pour le prêteur qui, dans ce cas, “assez longtemps avant que le consommateur ne soit lié par le contrat de crédit ou par l’offre”, doit lui-même au moins fournir au consommateur le formulaire d’information (voir également à cet égard DE MUYNCK, Michiel, “Consumentenkrediet: Richtlijn 2008/48/EG, DCCR, n° 83, 2009, p. 25). La perplexité du législateur belge qui n'avait pas d'autre choix que de transposer l'article 7 de la directive 2008/48/CE, est partagée par les auteurs (M. DE MUYNCK et R. STEENNOT, op. cit. p. 205).

Il n'y a guère que deux manières d'envisager l'exécution du devoir d'information. Soit le prêteur assume lui-même directement cette information, soit il en délègue contractuellement l'exécution à l'agent qui est en contact avec le consommateur. Dans ce dernier cas, cela revient à faire supporter contractuellement par l'agent, la même obligation que celle dont la loi entend le dispenser. L'article VII.72 n'a donc guère d'utilité pour l'agent qui intervient à titre accessoire. Si par contre, le prêteur entend assurer seul l'exécution du devoir d'information et de conseil, il pourra difficilement éviter un contact direct avec le consommateur. L'application pratique de cette disposition semble donc la priver de toute utilité.

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